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Page:Buffon - Œuvres complètes, éd. Lanessan, 1884, tome II, partie 3.pdf/155

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que l’action du courant des fleuves et des rivières, puisqu’il y a des montagnes presque entièrement composées de ces pierres arrondies qui n’ont pu y être accumulées que par les eaux de la mer : nous en avons déjà donné quelques exemples. M. Guettard rapporte, « qu’entre Saint-Chaumont en Lyonnais et Rives-de-Gier, les rochers sont entièrement composés de cailloux roulés… que les lits des montagnes ne sont faits eux-mêmes que de ces amas de cailloux entassés… que le chemin qui est au bas des montagnes est également rempli de ces cailloux… qu’on en retrouve après Bourgnais ; qu’on n’y voit que de ces pierres dans les chemins, de même que dans les campagnes voisines et dans les coupes des fossés… qu’ils ressemblent à ceux qui sont roulés par le Rhône… que des coupes de montagnes assez hautes, telles que celles qui sont à la porte de Lyon, en font voir abondamment ; qu’ils sont au-dessous d’un lit qu’on prendrait pour un sable marneux… que le chemin qui conduit de Lyon à Saint-Germain est également rempli de ces cailloux ; qu’avant d’arriver à Fontaine, on passe une montagne qui en est composée ; que ces cailloux sont de la grosseur d’une noix, d’un melon et de plusieurs autres dimensions entre ces deux-ci ; qu’on en voit des masses qui forment de mauvais poudingues… que ces cailloux roulés se voient aussi le long du chemin qui est sur le bord de la Saône ; que les montagnes en sont presque entièrement formées, et qu’elles renferment des poudingues semblables à ceux qui sont de l’autre côté de la rivière[1]. »

M. de la Galissonière, cité par M. Guettard, dit « qu’en sortant de Lyon, à la droite du Rhône, on rencontre des poudingues ; qu’on trouve dans quelques endroits du Languedoc de ces mêmes pierres ; que tous les bords du Rhône en Dauphiné en sont garnis, et même à une très grande élévation au-dessus de son lit, et que tout le terrain est rempli de ces cailloux roulés, mais qui me paraissent, ajoute M. de la Galissonière, plutôt des pierres noires calcaires que de vrais cailloux ou silex : ils forment dans plusieurs endroits des poudingues ; le plus grand nombre sont noirs, mais il y en a aussi de jaunes, de rougeâtres et très peu de blancs[2]. »

M. Guettard fait encore mention de plusieurs autres endroits où il a vu de ces cailloux roulés et des poudingues formés par leur assemblage en assez grosses masses. « Après avoir passé Luzarches et la Morlaix, on monte, dit-il, une montagne dont les pierres sont blanches, calcaires, remplies de pierres numismales, de peignes et de différentes autres coquilles mal conservées, et d’un si grand nombre de cailloux roulés, petits et de moyenne grosseur, qu’on pourrait regarder ces rochers comme des poudingues coquilliers : en suivant cette grande route, on retrouve les cailloux roulés à Creil, à Fitz-James et dans un endroit appelé la Folie : ils ne diffèrent pas essentiellement de ceux qui se présentent dans les cantons précédents, ni par leur grosseur, ni par leur couleur qui est communément noirâtre. Cette couche noire est celle que j’ai principalement remarquée dans les cailloux roulés que j’ai observés parmi les sables de deux endroits bien éloignés de ces derniers. Ces sables sont entre Andreville et Épernon[3]. » Les cailloux roulés qui se trouvent dans les plaines de la Crau d’Arles sont aussi des pierres calcaires de couleur bleuâtre : on voit de même sur les bords et dans le lit de la rivière Necker, près de Cronstadt en Allemagne, des masses considérables de poudingues formés de morceaux calcaires, arrondis, blancs, gris roussâtres, etc. ; il se trouve des masses semblables de ces galets réunis sur les montagnes voisines et jusqu’à leur sommet, d’où ils ont sans doute roulé dans les plaines et dans le lit des rivières.

On peut regarder le marbre appelé brèche antique comme un poudingue calcaire, composé de gros morceaux arrondis bien distincts, les uns blancs, bleus, rouges, et les autres

  1. Mémoires de l’Académie des sciences, année 1753, p. 158.
  2. Idem, ibidem, page 159.
  3. Idem, année 1753, p. 186.