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Page:Buffon - Œuvres complètes, éd. Lanessan, 1884, tome II, partie 3.pdf/18

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mi-partie de brut et d’organique, sert également aux productions de la nature active dans les deux empires de la vie et de la mort ; car comme la terre végétale et toutes les substances calcinables contiennent beaucoup plus de parties organiques que les autres matières produites ou dénaturées par le feu, ces parties organiques, toujours actives, ont fait de fortes impressions sur la matière brute et passive, elles en ont travaillé toutes les surfaces et quelquefois pénétré l’épaisseur ; l’eau développe, délaie, entraîne et dépose ces éléments organiques sur les matières brutes : aussi la plupart des minéraux figurés ne doivent leurs différentes formes qu’au mélange et aux combinaisons de cette matière active avec l’eau qui lui sert de véhicule. Les productions de la nature organisée qui, dans l’état de vie et de végétation, représentent sa force et font l’ornement de la terre, sont encore, après la mort, ce qu’il y a de plus noble dans la nature brute ; les détriments des animaux et des végétaux conservent des molécules organiques actives qui communiquent à cette matière passive les premiers traits de l’organisation en lui donnant la forme extérieure. Tout minéral figuré a été travaillé par ces molécules organiques, provenant du détriment des êtres organisés ou par les premières molécules organiques existantes avant leur formation : ainsi les minéraux figurés tiennent tous de près ou de loin à la nature organisée ; et il n’y a de matières entièrement brutes que celles qui ne portent aucun trait de figuration, car l’organisation a, comme toute autre qualité de la matière, ses degrés et ses nuances dont les caractères les plus généraux, les plus distincts et les résultats les plus évidents, sont la vie dans les animaux, la végétation dans les plantes et la figuration dans les minéraux.

Le grand et premier instrument avec lequel la nature opère toutes ses merveilles est cette force universelle, constante et pénétrante dont elle anime chaque atome de matière en leur imprimant une tendance mutuelle à se rapprocher et s’unir ; son autre grand moyen est la chaleur, et cette seconde force tend à séparer tout ce que la première a réuni ; néanmoins elle lui est subordonnée, car l’élément du feu, comme toute autre matière, est soumis à la puissance générale de la force attractive : celle-ci est d’ailleurs également répartie dans les substances organisées comme dans les matières brutes ; elle est toujours proportionnelle à la masse, toujours présente, sans cesse active ; elle peut travailler la matière dans les trois dimensions à la fois, dès qu’elle est aidée de la chaleur, parce qu’il n’y a pas un point qu’elle ne pénètre à tout instant, et que par conséquent la chaleur ne puisse étendre et développer dès qu’elle se trouve dans la proportion qu’exige l’état des matières sur lesquelles elle opère : ainsi par la combinaison de ces deux forces actives, la matière ductile[NdÉ 1], pénétrée et tra-

  1. Nous savons déjà ce que Buffon entend par « matière ductile », c’est celle qui contient des molécules organiques.