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Page:Buffon - Œuvres complètes, éd. Lanessan, 1884, tome II, partie 3.pdf/94

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est beaucoup moins sensible et même ne se remarque plus : autre preuve que la figuration des minéraux dépend des parties organiques qu’ils renferment, car les premiers lits de schiste reçoivent par la stillation des eaux les impressions de la terre végétale qui les recouvre, et c’est par l’action des éléments actifs contenus dans cette terre que les schistes du lit supérieur prennent une sorte de figuration régulière, dont l’apparence ne subsiste plus dans les lits inférieurs, parce qu’ils ne peuvent rien recevoir de la terre végétale, en étant trop éloignés et séparés par une grande épaisseur de matière impénétrable à l’eau.

Au reste, le schiste commun ne se délite pas en feuillets aussi minces que l’ardoise, et il ne résiste pas aussi longtemps aux impressions des éléments humides ; mais il résiste également à l’action du feu avant de se vitrifier, et, comme il contient une petite quantité de bitume, il semble brûler avant de se fondre ; et, comme nous venons de le dire, il y a même des schistes qui sont presque aussi inflammables que le charbon de terre. Ce dernier effet a déçu quelques minéralogistes, et leur a fait penser que le fond du charbon de terre n’était, comme celui des schistes, que de l’argile mêlée de bitume, tandis que la substance de ce charbon est, au contraire, de la matière végétale plus ou moins décomposée, et que, s’il se trouve de l’argile mêlée dans le charbon, ce n’est que comme matière étrangère ; mais il est vrai que la quantité de bitume et de matière pyriteuse est peut-être aussi grande dans certains schistes que dans les charbons de terre impurs et de mauvaise qualité. Il y a même des argiles, surtout dans les couches les plus basses, qui sont mêlées d’une assez grande quantité de bitume et de pyrite pour devenir inflammables ; elles sont en même temps sèches et dures à peu près comme le schiste, et ce bitume des argiles et des schistes s’est formé dès les premiers temps de la nature vivante par la décomposition des végétaux et des animaux, dont les huiles et les graisses, saisies par l’acide, se sont converties en bitumes ; et les schistes, comme les argiles, contiennent ordinairement d’autant plus de bitume, qu’ils sont situés plus profondément et qu’ils sont plus voisins des veines de charbon auxquelles ils servent de lits et d’enveloppe ; car, lorsqu’on ne trouve pas l’ardoise au-dessous des schistes, on peut espérer d’y trouver des charbons de terre.

Dans les couches les plus profondes, il y a aussi des argiles qui ressemblent aux schistes, et même aux ardoises, par l’apparence de leur dureté, de leur couleur et de leur inflammabilité ; cependant cette argile, exposée à l’air, démontre bientôt les différences qui la séparent de l’ardoise : elle n’est pas longtemps sans s’exfolier, s’imbiber d’humidité, se ramollir et reprendre sa qualité d’argile, au lieu que les ardoises, loin de s’amollir à l’air, ne font que s’y durcir davantage, et l’on doit mettre les mauvais schistes au nombre de ces argiles dures.

Comme toutes les argiles, ainsi que les schistes et les ardoises, ont été primitivement formées des sables vitreux atténués et décomposés dans l’eau, on ne peut se dispenser d’admettre différents degrés de décomposition dans ces sables : aussi trouve-t-on dans l’argile des grains encore entiers de ce sable vitreux qui ne sont que peu ou point altérés,

    ou vingt pieds de hauteur, au lieu que les pierres du lit de cosse n’ont quelquefois que deux ou trois pouces de longueur sur quelques-uns de largeur et d’épaisseur…

    Celles des autres bancs qui ont vingt pieds de hauteur sont ordinairement des bancs les plus inférieurs, et même de ceux dont on fait usage ; les bancs qui précèdent approchent plus ou moins de cette hauteur, selon qu’ils en sont plus voisins, et la hauteur est toujours proportionnée à la profondeur : c’est aussi suivant ce rapport qu’ils sont d’une pierre plus fine et plus aisée à travailler… On fouille cinquante, soixante pieds, et même davantage, avant de trouver un bon banc, et lorsqu’on l’a atteint on continue de fouiller jusqu’à ce que le banc change, de sorte que ces carrières ont quelquefois plus de cent pieds de profondeur… Mémoires de M. Guettard, dans ceux de l’Académie des sciences, année 1757, p. 52.