Page:Buffon - Œuvres complètes, éd. Lanessan, 1884, tome III.djvu/58

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appelle des hochets, qui peuvent se conserver et s’accumuler sans s’effleurir, en sorte que chaque famille du peuple fait sa provision de hochets en été pour se chauffer en hiver[1].

Mais l’usage du charbon de terre, sans mélange ni addition de terre étrangère, est

    (Je ne puis me dispenser d’observer au savant auteur que son explication pèche en ce que les bitumes ne tiennent pas d’autre air subtil que de l’air inflammable.)

    « Dans cette espèce de corollaire, on entrevoit deux propriétés distinctes qui appartiennent à la façon donnée au charbon de terre : 1o une économie sur la matière même ; 2o une sorte de correctif aux vapeurs de houille.

    » Le premier effet résultant de cette impastation paraît sensible, puisque le feu n’a point une prise absolue sur le combustible soumis à son action ; l’argile ajoutée au charbon arrête la combustion, retient, tant qu’elle ne se consume pas, une portion de houille, de manière que cet amalgame, en ne résistant point trop au feu, y résiste assez pour que la houille ne s’en sépare pas avant d’être consumée : la destruction du charbon par le feu est ralentie en conséquence ; il s’en consomme nécessairement une moindre quantité dans un même espace de temps que si le charbon recevait à nu l’action de la flamme… Les rédacteurs de l’Encyclopédie ne font point difficulté d’avancer que ces pelotes donnent une chaleur plus durable et plus ardente que celle du charbon de terre seul.

    » Les Chinois ne trouvent pas seulement que leur moui, ou pelotes de houille, donne une chaleur beaucoup plus forte que le bois, et qui coûte infiniment moins, mais en outre ils y trouvent l’avantage de ménager leur bois, et ils prétendent encore par cet apprêt se garantir de l’incommodité de l’odeur.

    » Plusieurs physiciens sont du même sentiment. M. Zimmerman (Journal économique, avril 1751) donne cette préparation comme un moyen de brûler le charbon de terre sans désagrément et sans danger. M. Scheuchzer, dans son Voyage des Alpes, pense de même ; l’opinion des commissaires nommés par l’Académie des sciences est aussi positive sur ce point. » Du charbon de terre, par M. Morand, p. 1286.

  1. Voyez, dans l’ouvrage de M. Morand, le détail des procédés pour la façon des hochets, p. 355 et suiv. « Le feu de ces hochets est d’une fort longue durée, dit cet auteur ; il se conserve longtemps sans qu’on y touche : on ne le renouvelle que deux fois par jour, et trois fois lorsqu’il fait un grand froid. À Valenciennes, on fait des briquettes dans un moule de fer, en ovale, de cinq pouces et demi de long sur quatre pouces de large, mesure prise en dedans. L’argile que l’on emploie avec le charbon pour former ces briquettes est de deux sortes : l’une, qui est très commune dans les fosses, est le bleu marle ou marle à boulets, parce qu’on s’en sert pour faire les briquettes qu’on appelle boulets ; c’est une espèce d’argile calcaire qui tient à la langue et qui fait effervescence avec les acides. Une seconde terre, que l’on emploie aussi dans les briquettes, se tire des bords de l’Escaut, où elle est déposée dans le temps des grandes eaux : c’est un limon sableux, argileux, de couleur jaune obscure, et qui se manie comme une bonne argile. À Try, distant de Valenciennes d’une lieue, et à Monceau, qui est à deux lieues de cette ville, on emploie au chauffage la houille d’Anzin ; ou fait entrer dans les briquettes de la marle qui se trouve dans ces deux endroits. Ces marles sont des terres argileuses, calcaires, blanches comme de la craie, faisant effervescence avec les acides. Selon les ouvriers, les briquettes faites avec de la marle brûlent mieux que celles qui sont faites avec du limon, et il ne faut qu’un dixième de marle et neuf parties de charbon… On délaie une mesure d’argile dans l’eau, de manière à en faire une bouillie claire et coulante, que l’on verse au milieu d’un grand cercle de houille : si on met trop d’argile, les briquettes brûlent plus difficilement, et, si on en met en trop petite quantité, la houille ne peut faire corps avec l’argile, et les briquettes n’ont point de solidité. La proportion ordinaire est d’une partie de détrempe sur six de houille ; on mêle le tout ensemble de la même façon que l’on mêle le sable et la chaux pour faire du mortier ; lorsque cette masse a pris la consistance d’une matière un peu solide, l’ouvrier place à côté de lui un carreau de pierre, et fait avec une palette ce que les Liégeois font avec leurs mains ; et, à mesure qu’il fait les briquettes, il les arrange dans l’endroit où l’on veut les garder, de la même façon que l’on arrange les briques pour former une muraille. » Du charbon de terre, par M. Morand, p. 487 et suiv.