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Page:Buffon - Œuvres complètes, éd. Lanessan, 1884, tome IV, Partie 1.djvu/107

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Nous avons parlé de l’aimant, comme des autres matières ferrugineuses, à l’article du fer ; mais nous nous sommes réservé d’examiner de plus près ce minéral magnétique qui, quoique aussi brut qu’aucun autre, semble tenir à la nature active et sensible des êtres organisés : l’attraction, la répulsion de l’aimant, sa direction vers les pôles du monde, son action sur les corps animés, et la faculté qu’il a de communiquer toutes ses propriétés sans en perdre aucune, sans que ses forces s’épuisent, et même sans qu’elles subissent le moindre affaiblissement, toutes ces qualités, réunies ou séparées, paraissent être autant de vertus magiques, et sont au moins des attributs uniques, des singularités de nature d’autant plus étonnantes qu’elles semblent être sans exemple, et que, n’ayant été jusqu’ici que mal connues, peu comparées, on a vainement tenté d’en deviner les causes.

Les philosophes anciens, plus sages, quoique moins instruits que les modernes, n’ont pas eu la vaine prétention de vouloir expliquer par des causes mécaniques tous les effets de la nature ; et, lorsqu’ils ont dit que l’aimant avait des affections d’amour et de haine, ils indiquaient seulement, par ces expressions, que la cause de ces affections de l’aimant devait avoir quelque rapport avec la cause qui produit de semblables affections dans les êtres sensibles. Et peut-être se trompaient-ils moins que les physiciens récents qui ont voulu rapporter les phénomènes magnétiques aux lois de notre mécanique grossière. Aussi tous leurs efforts, tous leurs raisonnements, appuyés sur des suppositions précaires, n’ont abouti qu’a démontrer l’erreur de leurs vues dans le principe, et l’insuffisance de leurs moyens d’explication. Mais, pour mieux connaître la nature du magnétisme et sa dépendance de l’électricité, comparons les principaux effets de ces deux forces en présentant d’abord tous les faits semblables ou analogues, et sans dissimuler ceux qui paraissent différents ou contraires.

L’action du magnétisme et celle de l’électricité sont également variables, tantôt en plus, tantôt en moins ; et leurs variations particulières dépendent en grande partie de l’état de l’atmosphère. Les phénomènes électriques que nous pouvons produire augmentent en effet ou diminuent de force, et même sont quelquefois totalement supprimés, suivant qu’il y a plus ou moins d’humidité dans l’air, que le fluide électrique est plus ou moins répandu dans l’atmosphère, et que les nuages orageux y sont plus ou moins accumulés. De même les barres de fer, que l’on veut aimanter par la seule exposition aux impressions du magnétisme général, acquièrent plus ou moins promptement la vertu magnétique, suivant que le fluide électrique est plus ou moins abondant dans l’atmosphère ; et les aiguilles des boussoles éprouvent des variations, tant périodiques qu’irrégulières, qui ne paraissent dépendre que du plus ou moins de force de l’électricité de l’air.

L’aimant primordial n’est qu’une matière ferrugineuse qui, ayant d’abord subi l’action du feu primitif, s’est ensuite aimantée par l’impression du magnétisme du globe ; et, en général, la force magnétique n’agit que sur le fer ou sur les matières qui en contiennent ; de même la force électrique ne se produit que dans certaines matières, telles que l’ambre, les résines, les verres et les autres substances qu’on appelle électriques par elles-mêmes, quoiqu’elle puisse se communiquer à tous les corps.

Les aimants ou fers aimantés s’attirent mutuellement dans un sens, et se repoussent réciproquement dans le sens opposé : cette répulsion et cette attraction sont plus sensibles lorsqu’on approche l’un de l’autre leurs pôles de même nom ou de différent nom. Les verres, les résines et les autres corps électriques par eux-mêmes ont aussi, dans plusieurs circonstances, des parties polaires, des portions électrisées en plus et d’autres en moins, dans lesquelles l’attraction et la répulsion se manifestent par des effets constants et bien distincts.

Les forces électrique et magnétique s’exercent également en sens opposé et en sens direct ; et leur réaction est égale à leur action.

On peut, en armant les aimants d’un fer qui les embrasse, diriger ou accumuler sur un ou plusieurs points la force magnétique ; on peut de même, par le moyen des verres et des