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Page:Buffon - Œuvres complètes, éd. Lanessan, 1884, tome IV, Partie 1.djvu/161

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en petit, ces propriétés ne se présentent pas aussi évidemment, ni par des effets aussi constants et aussi réguliers sur le globe que sur la pierre d’aimant : cette différence entre les effets du magnétisme général du globe et du magnétisme particulier de l’aimant peut provenir de plus d’une cause. Premièrement, de la figure sphéroïde de la terre : on a éprouvé, en aimantant de petits globes de fer, qu’il est difficile de leur donner des pôles bien déterminés ; et c’est probablement en raison de sa sphéricité que des pôles magnétiques ne sont pas aussi distincts sur le globe terrestre qu’ils le sont sur des aimants non sphériques. Secondement, la position de ces pôles magnétiques, qui sont plus ou moins voisins des vrais pôles de la terre et plus ou moins éloignés de l’équateur, doit influer puissamment sur la déclinaison dans chaque lieu particulier, suivant sa situation plus ou moins distante de ces mêmes pôles magnétiques, dont la position n’est point encore assez déterminée.

Le magnétisme du globe, dont les effets viennent de nous paraître si variés et même si singuliers, n’est donc pas le produit d’une force particulière, mais une modification d’une force plus générale qui est celle de l’électricité, dont la cause doit être attribuée aux émanations de la chaleur propre du globe ; lesquelles, partant de l’équateur et des régions adjacentes, se portent, en se courbant et se plongeant sur les régions polaires où elles tombent, dans des directions d’autant plus approchantes de la perpendiculaire que la chaleur est moindre et que ces émanations se trouvent dans les régions froides plus complètement éteintes ou supprimées. Or, cette augmentation d’inclinaison, à mesure que l’on s’avance vers les pôles de la terre, représente parfaitement l’incidence de plus en plus approchante de la perpendiculaire des rayons ou faisceaux d’un fluide animé par les émanations de la chaleur du globe, lesquelles, par les lois de l’équilibre, doivent se porter en convergeant et s’abaissant de l’équateur vers les deux pôles.

La force particulière des pôles magnétiques, dans l’action qu’ils exercent sur l’inclinaison, est assez d’accord avec la force générale qui détermine cette inclinaison vers les pôles terrestres, puisque l’une et l’autre de ces forces agissent presque également dans une direction qui tend plus ou moins à la perpendiculaire. Dans la déclinaison, au contraire, l’action des pôles magnétiques se croise et forme un angle avec la direction générale et commune de tout le système du magnétisme vers les pôles de la terre. Les éléments de l’inclinaison sont donc plus simples que ceux de la déclinaison, puisque celle-ci résulte de la combinaison de deux forces agissantes dans deux directions différentes, tandis que l’inclinaison dépend principalement d’une cause simple, dans une direction inclinée et relative à la courbure du globe. C’est par cette raison que l’inclinaison paraît être et est en effet plus régulière, plus suivie et plus constante que la déclinaison dans toutes les parties de la terre.

On peut donc espérer, comme je l’ai dit, qu’en multipliant les observations sur l’inclinaison, et déterminant par ce moyen la position des lieux, soit sur terre, soit sur mer, l’art de la navigation tirera du recueil de ces observations autant et plus d’utilité que de tous les moyens astronomiques ou mécaniques employés, jusqu’à ce jour, à la recherche des longitudes.