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Page:Buffon - Œuvres complètes, éd. Lanessan, 1884, tome V.djvu/133

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L’espèce paraît être répandue, dans tout l’ancien continent, depuis la Suède jusqu’au Sénégal[1], mais je ne sais si elle se trouve aussi dans le nouveau, car les relations d’Amérique n’en font aucune mention[NdÉ 1] : il y a seulement un oiseau qu’on dit être naturel au Pérou, et qu’on ne voit dans la Caroline qu’en été, qui ressemble au milan à quelques égards, et qui a comme lui la queue fourchue. M. Catesby en a donné la description et la figure[2] sous le nom d’épervier à queue d’hirondelle, et M. Brisson l’a appelé milan de la Caroline[3]. Je serais assez porté à croire que c’est une espèce voisine de celle de notre milan, et qui la remplace dans le nouveau continent.

Mais il y a une autre espèce encore plus voisine, et qui se trouve dans nos climats comme oiseau de passage, que l’on a appelé le milan noir[NdÉ 2]. Aristote distingue cet oiseau du précédent, qu’il appelle simplement milan, et il donne à celui-ci l’épithète de milan étolien[4], parce que probablement il était, de son temps, plus commun en Étolie qu’ailleurs. Belon[5] fait aussi mention de ces deux milans ; mais il se trompe lorsqu’il dit que le premier, qui est le milan royal, est plus noir que le second, qu’il appelle néanmoins milan noir ; ce n’est peut-être qu’une faute d’impression ; car il est certain que le milan royal est moins noir que l’autre ; au reste, aucun des naturalistes anciens et modernes n’a fait mention de la différence la plus apparente entre ces deux oiseaux, et qui consiste en ce que le milan royal a la queue fourchue, et que le milan noir l’a égale ou presque égale dans toute sa largeur, ce qui néanmoins n’empêche pas que ces deux oiseaux ne soient d’espèce très voisine, puisqu’à l’exception de cette forme de la queue ils se ressemblent par tous les autres caractères, car le milan noir, quoique

  1. Il paraît que le milan royal se trouve dans le Nord, puisque M. Linnæus l’a compris dans sa liste des oiseaux de Suède, sous la dénomination de falco cerâ flavâ, caudâ forcipatâ ; corpore ferrugineo, capite albidiore. Faun. Suec., no 59 ; et l’on voit aussi, par les témoignages des voyageurs, qu’il se trouve dans les provinces les plus chaudes de l’Afrique ; on rencontre encore ici (en Guinée), dit Bosman, une espèce d’oiseau de proie ; ce sont les milans : ils enlèvent, outre les poulets dont ils tirent leur nom, tout ce qu’ils peuvent découvrir et attraper, soit viande, soit poisson, et cela avec tant de hardiesse qu’ils arrachent aux femmes nègres les poissons qu’elles portent vendre au marché ou qu’elles crient dans les rues. Voyage de Guinée, p. 278. Près du désert, au long du Sénégal, dit un autre voyageur, on trouve un oiseau de proie de l’espèce du milan, auquel les Français ont donné le nom d’écouffe… Toute nourriture convient à sa faim dévorante ; il n’est point épouvanté des armes à feu ; la chair cuite ou crue le tente si vivement qu’il enlève aux matelots leurs morceaux dans le temps qu’ils les portent à leur bouche. Hist. générale des voyages, par M. l’abbé Prévost, t. III, p. 306.
  2. Hist. nat. de la Caroline, par Catesby, t. Ier, p. 4, pl. iv, avec une bonne figure coloriée.
  3. Le milan de la Caroline. Brisson, Ornith., t. Ier, p. 418.
  4. « Pariunt milvi ova bina magna ex parte, interdum tamen et terna, totidemque excludunt pullos ; sed qui Etolius nuncupatur, vel quaternos aliquandò excludit. » Arist., Hist. anim., lib. vi, cap. vi.
  5. Milan noir. Belon, Hist. nat. des Oiseaux, p. 131.
  1. Cette espèce n’existe pas en Amérique ; elle paraît être confinée en Europe.
  2. Milvus niger Briss. [Note de Wikisource : actuellement, Milvus migrans Boddaert].