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Page:Buffon - Œuvres complètes, éd. Lanessan, 1884, tome V.djvu/164

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line sont encore des oiseaux étrangers, dont il sera fait mention dans la suite. On peut voir par cette longue énumération qu’en séparant même les oiseaux étrangers, et qui ne sont pas précisément des faucons, et en ôtant encore le faucon pattu, qui n’est peut-être qu’une variété ou une espèce très voisine de celle du faucon commun, il y en a dix-neuf que nous réduisons à quatre espèces, savoir : le faucon commun, le faucon passager, le sacre et le busard, dont il n’y en a plus que deux qui soient en effet des faucons.

Après cette réduction faite de tous les prétendus faucons aux deux espèces du faucon commun ou gentil, et du faucon passager ou pèlerin[NdÉ 1], voici les différences que nos anciens fauconniers trouvaient dans leur nature et mettaient dans leur éducation. Le faucon gentil mue dès le mois de mars, et même plus tôt ; le faucon pèlerin ne mue qu’au mois d’août ; il est plus plein sur les épaules et il a les yeux plus grands, plus enfoncés, le bec plus gros, les pieds plus longs et mieux fendus que le faucon gentil[1] ; ceux qu’on prend au nid s’appellent faucons niais ; lorsqu’ils sont pris trop jeunes, ils sont souvent criards et difficiles à élever ; il ne faut donc pas les dénicher avant qu’ils soient un peu grands, ou, si l’on est obligé de les ôter de leur nid, il ne faut point les manier, mais les mettre dans un nid le plus semblable au leur qu’on pourra, et les nourrir de chair d’ours, qui est une viande assez commune dans les montagnes où l’on prend ces oiseaux ; et, au défaut de cette nourriture, on leur donnera de la chair de poulet ; si l’on ne prend pas ces précautions, les ailes ne leur croissent pas[2], et leurs jambes se cassent ou se déboîtent aisément ; les faucons-sors, qui sont les jeunes, et qui ont été pris en septembre, octobre et novembre, sont les meilleurs et les plus aisés à élever ; ceux qui ont été pris plus tard, en hiver et au printemps suivant, et qui par conséquent ont neuf ou dix mois d’âge, sont déjà trop accoutumés à leur liberté pour subir aisément la servitude, et demeurer en captivité sans regret, et l’on n’est jamais sûr de leur obéissance et de leur fidélité dans le service ; ils trompent souvent leur maître, et quittent lorsqu’il s’y attend le moins. On prend tous les ans les faucons pèlerins au mois de septembre, à leur passage dans les îles ou sur les falaises de la mer. Ils sont, de leur naturel, prompts, propres à tout faire, dociles et fort aisés à instruire[3] ; on peut les faire voler pendant tout le mois de mai et celui de juin, parce qu’ils sont tardifs à muer ; mais aussi, dès que la mue commence, ils se dépouillent en peu de temps. Les lieux où l’on prend le plus de faucons pèlerins sont non seulement les côtes de Barbarie, mais

  1. Fauconnerie d’Artelouche, imprimée à la suite de la Vénerie de du Fouilloux, et des Fauconneries de Jean de Franchières et de Guillaume Tardif. Paris, 1614, p. 89.
  2. Recueil de tous les oiseaux de proie qui servent à la fauconnerie, par G. B., imprimé à la suite des Fauconneries citées dans la note précédente, p. 114, verso.
  3. Fauconnerie de Jean de Franchières, p. 2, recto.
  1. Ces deux oiseaux appartiennent en réalité à la même espèce.