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Page:Buffon - Œuvres complètes, éd. Lanessan, 1884, tome V.djvu/194

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s’étendent au delà de l’extrémité de la queue, et qu’il n’y a que le grand duc et le scops ou petit duc, dont les ailes, lorsqu’elles sont pliées, n’arrivent pas jusqu’au bout de la queue ; d’ailleurs on voit, ou plutôt on entend tous ces oiseaux faire d’assez longs vols en criant ; dès lors il semble que la puissance de voler au loin pendant la nuit leur appartient aussi bien qu’aux autres, mais que n’ayant pas d’aussi bons yeux, et ne voyant pas de loin, ils ne peuvent se former un tableau d’une grande étendue de pays, et que c’est par cette raison qu’ils n’ont pas, comme la plupart des autres oiseaux, l’instinct des migrations, qui suppose ce tableau pour se déterminer à faire de grands voyages ; quoi qu’il en soit, il paraît qu’en général nos hiboux et nos chouettes sont assez sédentaires : on m’en a apporté de presque toutes les espèces, non seulement en été, au printemps, en automne, mais même dans les temps les plus rigoureux de l’hiver ; il n’y a que le scops ou petit duc qui ne se trouve pas dans cette saison ; et j’ai été en effet informé que cette petite espèce de hibou part en automne et arrive au printemps : ainsi ce serait plutôt au petit duc qu’au moyen duc qu’on pourrait attribuer la fonction de conduire les cailles ; mais encore une fois, ce fait n’est pas prouvé, et de même je ne sais pas sur quoi peut être fondé un autre fait avancé par Aristote, qui dit que le chat-huant (glaux, noctua, selon son interprète Gaza[1]), se cache pendant quelques jours de suite, car on m’en a apporté, dans la plus mauvaise saison de l’année, qu’on avait pris dans les bois ; et si l’on prétendait que le mot glaux, noctua indique ici l’effraie, le fait serait encore moins vrai ; car à l’exception des soirées très sombres et pluvieuses, on l’entend tous les jours de l’année souffler et crier à l’heure du crépuscule.

Les douze oiseaux de nuit, indiqués par Aristote, sont : byas, otos, scops, phinis, ægotilas, eleos, nycticorax, ægolios, glaux, charadrios, chalcis, ægocephalos ; traduits en latin par Théodore Gaza :

Bubo, otus, asio, ossifraga, caprimulgus, aluco, cicunia (ou clama ou ulula), ulula, noctua, charadrius, chalcis, capriceps ; j’ai cru devoir interpréter en français les neuf premiers comme il suit :

Le duc ou grand duc, le hibou ou moyen duc, le petit duc, l’orfraie, le tête-chèvre ou crapaud-volant, l’effraie ou fresaie, la hulotte, la chouette ou grande chevêche, le chat-huant.

Tous les naturalistes et les littérateurs conviendront aisément avec moi : 1o que le byas des Grecs, bubo des Latins, est notre duc ou grand duc ; 2o que l’otos des Grecs, otus des Latins, est notre hibou ou moyen duc ; 3o que le scops des Grecs, asio des Latins, est notre petit-duc ; 4o que le phinis des Grecs, ossifraga des Latins, est notre orfraie ou grand aigle de mer ; 5o que l’ægotilas des Grecs, caprimulgus des Latins, est notre tête-

  1. « Paucis quibusdam diebus (glaux) noctua latet. » Aristote, Hist. anim., lib. viii, cap. xvi.