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Page:Buffon - Œuvres complètes, éd. Lanessan, 1884, tome V.djvu/204

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avant[1] ; mais ces aigrettes sont plus courtes que celles du grand duc, et n’ont guère plus d’un pouce de longueur ; elles paraissent proportionnées à sa taille, car il ne pèse qu’environ dix onces, et n’est pas plus gros qu’une corneille ; il forme donc une espèce évidemment différente de celle du grand duc, qui est gros comme une oie, et de celle du scops ou petit duc, qui n’est pas plus grand qu’un merle, et qui n’a au-dessus des oreilles que des aigrettes très courtes. Je fais cette remarque parce qu’il y a des naturalistes qui n’ont regardé le moyen et le petit duc que comme de simples variétés d’une seule et même espèce : le moyen duc a environ un pied de longueur de corps depuis le bout du bec jusqu’aux ongles, trois pieds de vol ou d’envergure, et cinq ou six pouces de longueur de queue ; il a le dessus de la tête, du cou, du dos et des ailes rayé de gris, de roux et de brun ; la poitrine et le ventre sont roux, avec des bandes brunes irrégulières et étroites ; le bec est court et noirâtre, les yeux sont d’un beau jaune, les pieds sont couverts de plumes rousses jusqu’à l’origine des ongles, qui sont assez grands et d’un brun noirâtre ; on peut observer de plus qu’il a la langue charnue et un peu fourchue, les ongles très aigus et très tranchants, le doigt extérieur mobile et pouvant se tourner en arrière, l’estomac assez ample, la vésicule du fiel très grande, les boyaux longs d’environ vingt pouces, les deux cæcums de deux pouces et demi de profondeur, et plus gros à proportion que dans les autres oiseaux de proie. L’espèce en est commune et beaucoup plus nombreuse dans nos climats[2] que celle du grand duc, qu’on n’y rencontre que rarement en hiver, au lieu que le moyen duc y reste toute l’année, et se trouve même plus aisément en hiver qu’en été : il habite ordinairement dans les anciens bâtiments ruinés, dans les cavernes des rochers[3], dans le creux des vieux arbres, dans les forêts en montagne, et ne descend guère dans les plaines[NdÉ 1] ; lorsque d’autres oiseaux l’attaquent, il se sert très bien et des griffes et du bec ; il se retourne aussi sur le dos pour se défendre quand il est assailli par un ennemi trop fort.

  1. Aldrovande dit avoir observé que chaque plume auriculaire qui compose l’aigrette peut se mouvoir séparément, et que la peau qui recouvre la cavité des oreilles naît de la partie intérieure la plus voisine de l’œil.
  2. Il est plus commun en France et en Italie qu’en Angleterre. On le trouve très fréquemment en Bourgogne, en Champagne, en Sologne et dans les montagnes de l’Auvergne.
  3. « Sta il gufo nelle grotte, per le buche degli alberi, nell’antriaglie o crepature di muri e tetti di case disabitate, ne dirupi e luaghi cremi. » Olina, Ucceller., fog. 56.
  1. Le hibou habite de préférence les forêts. Il ne se rapproche qu’accidentellement des villages, où on le trouve surtout dans les vergers. Il est, du reste, très peu craintif. Il ne vit par paires qu’au moment des amours. Pendant le reste de l’année il forme souvent des bandes de dix, quinze ou vingt individus. Il ne mange que peu d’oiseaux ; il fait surtout sa nourriture de rats, de mulots et autres petits mammifères. Il peut donc être classé parmi les oiseaux utiles et que l’on doit protéger. D’après Brehm, « lorsqu’on prend de jeunes hiboux encore couverts de leur duvet, et que l’on s’occupe d’eux, ils deviennent bientôt très privés et sont très plaisants. »