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Page:Buffon - Œuvres complètes, éd. Lanessan, 1884, tome V.djvu/209

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LE SCOPS OU PETIT DUC[1]

Voici la troisième et dernière espèce du genre des hiboux[NdÉ 1], c’est-à-dire des oiseaux de nuit qui portent des plumes élevées au-dessus de la tête, et elle est aisée à distinguer des deux autres, d’abord par la petitesse même du corps de l’oiseau, qui n’est pas plus gros qu’un merle, et ensuite par le raccourcissement très marqué de ces aigrettes qui surmontent les oreilles, lesquelles, dans cette espèce, ne s’élèvent pas d’un demi-pouce et ne sont composées que d’une seule petite plume[2] ; ces deux caractères suffisent pour distinguer le petit duc du moyen et du grand duc, et on le reconnaîtra encore aisément à la tête, qui est proportionnellement plus petite par rapport au corps que celle des deux autres, et encore à son plumage plus élégamment bigarré et plus distinctement tacheté que celui des autres, car tout son corps est très joliment varié de gris, de roux, de brun et de noir, et ses jambes sont couvertes jusqu’à l’origine des ongles de plumes d’un gris roussâtre mêlé de taches brunes ; il diffère aussi des deux autres par le naturel, car il se réunit en troupe en automne et au printemps pour passer dans d’autres climats ; il n’en reste que très peu ou point du tout en hiver

  1. The short eared owl, le hibou à oreilles courtes : British zoology, pl. B 3 et pl. B 4, fig. 2. C’est pour ne rien omettre et pour tout indiquer que je cite ici la Zoologie britannique ; car cet ouvrage, dont le principal mérite consiste dans les planches, est même à cet égard encore très défectueux : par exemple les aigrettes des hiboux, qui ne sont composées que de plumes, y sont représentées comme si c’étaient de vraies oreilles de chair, etc. De même il est dit, dans le texte, que le hibou à oreilles courtes a treize pouces et demi anglais de longueur, ce qui fait plus de douze pouces et demi de France : or ce même oiseau n’a que sept pouces et demi tout au plus ; ainsi c’est probablement le moyen duc que l’auteur aura pris pour le petit duc ; et ce qui prouve encore son peu de connaissance et d’exactitude, c’est d’avoir également indiqué ce même oiseau dans les pl. B 3 et B 4, fig. 2. On voit, au premier coup d’œil, que ce ne doit pas être le même oiseau, puisque la figure représentée dans la pl. B 4, fig. 2, est d’un tiers plus petite que celle qui est représentée dans la pl. B 3, et que le moyen duc qui est représenté dans la pl. B 4, fig. 1, n’est pas plus grand que le petit duc, B 4, fig. 2 : or le moyen duc ayant, comme le dit Willughby, quatorze pouces et demi, si le petit duc en avait treize et demi, comme le dit l’auteur de la Zoologie britannique, pourquoi ne pas appuyer sur ce fait et relever l’erreur de ceux qui ne lui donnent que sept pouces, ou bien dire qu’en Angleterre les petits ducs sont plus gros qu’ailleurs, ou bien encore que c’est une espèce particulière à la Grande-Bretagne ? Cela valait bien la peine d’être discuté ; mais cet auteur ne discute rien, ne dit rien de nouveau, ni même rien de moderne, car il paraît ignorer beaucoup de choses qui ont été dites avant lui sur les sujets qu’il traite. L’ouvrage de M. Edwards est infiniment meilleur ; car indépendamment de ce que les dessins et les planches coloriées sont plus correctes, c’est que ses descriptions sont plus exactes, ses comparaisons plus justes, et que partout il paraît avoir une pleine connaissance de ce qui a été fait avant lui sur les objets qui ont rapport à ceux qu’il nous présente.
  2. « Aures, vel plumulæ in aurium modum surrectæ, in mortuo vix apparent, in vivo manifestiores, ex unâ tantùm pinnulâ constantes. » Aldrov., Avi., t. I, p. 531.
  1. Scops carniolica ou Ephialtes Scops L. [Note de Wikisource : actuellement Otus scops Linnæus, vulgairement petit-duc scops]. Les Scops sont, comme les Otus et les Bubo, des Rapaces de la famille des Strigidés. Ils se distinguent par un bec recourbé seulement au niveau de la pointe.