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Page:Buffon - Œuvres complètes, éd. Lanessan, 1884, tome V.djvu/263

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parlé ; les écrivains sacrés comparent son cri à un gémissement[1], et on prétend même que son nom hébreu jacnah est formé d’ianah, qui signifie hurler. Le docteur Browne dit que ce cri ressemble à la voix d’un enfant enroué, et qu’il est plus triste encore[2] : comment donc, avec cela, ne paraîtrait-il pas lugubre et même terrible, selon l’expression de M. Sandys, à des voyageurs qui ne s’enfoncent qu’avec inquiétude dans l’immensité de ces déserts, et pour qui tout être animé, sans en excepter l’homme, est un objet à craindre, et une rencontre dangereuse ?


LE TOUYOU

L’autruche de l’Amérique méridionale, appelée aussi autruche d’Occident, autruche de Magellan et de la Guiane, n’est point une autruche[NdÉ 1] : je crois que Le Maire est le premier voyageur qui, trompé par quelques traits de ressemblance avec l’autruche d’Afrique, lui ait appliqué ce nom[3]. Klein, qui a bien vu que l’espèce était différente, s’est contenté de l’appeler autruche bâtarde[4]. M. Barrère là nomme tantôt un héron[5], tantôt une grue ferrivore[6], tantôt un émeu à long cou[7] ; d’autres ont cru beaucoup mieux faire en lui appliquant d’après des rapports, à la vérité mieux saisis, cette dénomination composée, casoar gris à bec d’autruche ; Moehring[8] et M. Brisson[9] lui donnent le nom latin de rhea, auquel le dernier ajoute le nom américain de touyou, formé de celui de touyouyou, qu’il porte communément dans la Guiane[10] ; d’autres sauvages lui ont donné d’autres noms : yardu, yandu, andu et nandu-guacu, au Brésil[11] ; sallian, dans l’île de Maragnan[12] ; suri, au Chili[13], etc. Voilà bien des noms pour un oiseau si nouvellement connu ; pour moi j’adopterai volontiers celui de touyou, que lui a

  1. Michée, cap. i : « Luctum quasi struthionum. »
  2. Collections philosophiques, no 5, art. viii.
  3. Voyez ses Navigations australes, p. 129, dans le sommaire du no 22.
  4. Avium. Hist., p. 17.
  5. Ornithologia, p. 67.
  6. France équinoxiale, p. 133.
  7. Ornithologia, p. 64.
  8. Meth., Avi. Gen., 65.
  9. Brisson, t. V, p. 8.
  10. Barrère, France équinoxiale, p. 133.
  11. Nieremberg, p. 217 ; Marcgrave, p. 190 ; Pison, p. 84 ; de Laët, etc.
  12. Histoire générale des Voyages, t. XIV, p. 316.
  13. Nieremberg, p. 217.
  1. C’est le Rhea americana Lam. [Note de Wikisource : actuellement Rhea americana Linnæus, vulgairement nandou d’Amérique]. Les Rhea appartiennent à l’ordre des Coureurs et à la famille des Rhéidés, qui se distingue de celle des Struthionidés par des pieds à trois doigts, la tête et le cou en partie emplumés. On désigne souvent les Rhea sous le nom de Nandous.