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Page:Buffon - Œuvres complètes, éd. Lanessan, 1884, tome V.djvu/300

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Les deux cæcums sortent de l’intestin à environ sept pouces de l’anus, se dirigeant d’arrière en avant. Suivant Gessner, ils sont inégaux selon toutes leurs dimensions, et c’est le plus étroit qui est le plus long dans la raison de six à cinq[1]. M. Perrault dit seulement que le droit, qui a un pied plus ou moins, est ordinairement un peu plus long que le gauche[2].

À un pouce à peu près de l’anus, l’intestin se rétrécit ; puis, se dilatant, forme une poche capable de contenir un œuf, et dans laquelle s’insèrent les uretères et le canal déférent ; cette poche intestinale, appelée bourse de Fabrice[3], a aussi son cæcum long de deux pouces, large de trois lignes, et le trou qui communique de l’un à l’autre est surmonté d’un repli de la membrane interne, lequel peut servir de valvule[4].

Il résulte de ces observations que l’outarde, bien loin d’avoir plusieurs estomacs et de longs intestins, comme les ruminants, a au contraire le tube intestinal fort court et d’une petit capacité, et qu’il n’a qu’un seul ventricule ; en sorte que l’opinion de ceux qui prétendent que cet oiseau rumine[5] serait réfutée par cela seul : mais il ne faut pas non plus se persuader, avec Albert, que l’outarde soit carnassière, qu’elle se nourrisse de cadavres, que même elle fasse la guerre au petit gibier, et qu’elle ne mange de l’herbe et du grain que dans le cas de grande disette ; il faut encore moins conclure de ces suppositions qu’elle a le bec et les ongles crochus, toutes erreurs accumulées par Albert[6] d’après un passage d’Aristote mal entendu[7], admises par Gessner avec quelques modifications[8], mais rejetées par tous les autres naturalistes.

L’outarde est un oiseau granivore[NdÉ 1] : elle vit d’herbes, de grains et de toutes sortes de semences ; de feuilles de choux, de dent-de-lion, de navels, de myosotis ou oreille de souris, de vesce, d’ache, de daucus et même de foin, et de ces gros vers de terre que pendant l’été l’on voit fourmiller sur

  1. Gesner, de Avibus, page 486.
  2. Animaux de Perrault, partie ii, p. 107.
  3. Du nom de Fabricius ab Aquapendente, qui l’a le premier observée. Animaux de Perrault, partie ii, page 107.
  4. Ibidem.
  5. Athénée, Eustache ; voyez Gesner, page 484.
  6. Voyez Gesner, de Avibus, page 485.
  7. Aldrovande prétend que l’idée de faire de l’outarde un oiseau de proie a pu venir à Albert de ce passage d’Aristote : Avis Schythica quædam… que j’ai discuté plus haut. Voyez Aldrovande, Ornitholog., t. II, p. 90. Ce qu’il y a de certain, c’est que ce n’est pas d’après l’inspection de l’animal qu’Albert s’est formé cette idée.
  8. Gesner, de Avibus, page 485.
  1. À l’état jeune, l’outarde ne mange que des insectes ; plus tard, elle se nourrit de plantes vertes et de graines. L’hiver elle déterre ses aliments avec les pattes ; il paraît que la rosée bue, le matin, goutte à goutte, suffit pour apaiser sa soif. C’est la mère qui recueille les insectes destinés à la nourriture des jeunes. Dès que ceux-ci commencent à chercher eux-mêmes leurs aliments, ils se nourrissent d’herbes et de graines.