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Page:Buffon - Œuvres complètes, éd. Lanessan, 1884, tome V.djvu/405

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LE PETIT TÉTRAS À QUEUE PLEINE

J’ai exposé, à l’article précédent, les raisons que j’avais de faire de ce petit tétras une espèce ou plutôt une race séparée[NdÉ 1]. Gesner en parle, sous le nom de coq de bois (gallus sylvestris[1]), comme d’un oiseau qui a des barbillons rouges, et une queue pleine et non fourchue ; il ajoute que le mâle s’appelle coq noir en Écosse, et la femelle poule grise (greyhen). Il est vrai que cet auteur, prévenu de l’idée que le mâle et la femelle ne devaient pas différer, à un certain point, par la couleur des plumes, traduit ici le greyhen par gallina fusca, poule rembrunie, afin de rapprocher de son mieux la couleur des plumages ; et qu’ensuite il se prévaut de sa version infidèle pour établir que cette espèce est tout autre que celle de la poule moresque de Turner[2], par la raison que le plumage de cette poule moresque diffère tellement de celui du mâle qu’une personne peu au fait pourrait s’y méprendre, et regarder ce mâle et cette femelle comme appartenant à deux espèces différentes. En effet, le mâle est presque tout noir, et la femelle de la même couleur à peu près que la perdrix grise ; mais, au fond, c’est un nouveau trait de conformité qui rend plus complète la ressemblance de cette espèce avec celle du coq noir d’Écosse, car Gesner prétend en effet que ces deux espèces se ressemblent dans tout le reste. Pour moi, la seule différence que j’y trouve c’est que le coq noir d’Écosse a de petites taches rouges sur la poitrine, les ailes et les cuisses ; mais nous avons vu dans l’histoire du petit tétras à queue fourchue que dans les six premiers mois les jeunes mâles, qui doivent devenir tout noirs dans la suite, ont le plumage de leurs mères, c’est-à-dire de la femelle ; et il pourrait se faire que les petites taches rouges dont parle Gesner ne fussent qu’un reste de cette première livrée avant qu’elle se fût changée entièrement en un noir pur et sans mélange.

Je ne sais pourquoi M. Brisson confond cette race ou variété, comme il l’appelle, avec le tetrao pointillé de blanc de M. Linnæus[3], puisqu’un des caractères de ce tetrao, nommé en suédois racklehane, est d’avoir la queue fourchue ; et que d’ailleurs M. Linnæus ne lui attribue point de barbillons, tandis que le tétras dont il s’agit ici a la queue pleine, selon la figure donnée par Gesner, et que, selon sa description, il a des barbillons rouges à côté du bec.

  1. Gesner, de Avibus, p. 477.
  2. Gesner, de Avibus, p. 477.
  3. Linnæus, Fauna suecica, no 167.
  1. Les ornithologistes modernes lui donnent le nom de Lyrurus medius. On le considère comme un métis du Tétras urogalle et du Lyrure des bouleaux. [Note de Wikisource : Il s’agit en effet d’un hybride résultant du croisement des oiseaux décrits dans les deux articles précédents ; à ce titre, il n’est pas pourvu de nom binominal. Il est parfois désigné du nom vernaculaire de rackelhahn.] Le petit Tétras à plumage variable dont parle ensuite Buffon est le même que son petit Tétras à queue pleine.