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Page:Buffon - Œuvres complètes, éd. Lanessan, 1884, tome V.djvu/469

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I.LE FAISAN DORÉ OU LE TRICOLOR HUPPÉ DE LA CHINE.

Quelques auteurs ont donné à cet oiseau[NdÉ 1] le nom de faisan rouge[1] ; on eût été presque aussi bien fondé à lui donner celui de faisan bleu, et ces deux dénominations auraient été aussi imparfaites que celle de faisan doré, puisque toutes les trois, n’indiquant que l’une des trois couleurs éclatantes qui brillent sur son plumage, semblent exclure les deux autres : c’est ce qui m’a donné l’idée de lui imposer un nouveau nom, et j’ai cru que celui de tricolor huppé de la Chine le caractériserait mieux, puisqu’il présente à l’esprit ses attributs les plus apparents.

On peut regarder ce faisan comme une variété[NdÉ 2] du faisan ordinaire, qui s’est embelli sous un ciel plus beau : ce sont deux branches d’une même famille qui se sont séparées depuis longtemps, qui même ont formé deux races distinctes, et qui cependant se reconnaissent encore ; car elles s’allient, se mêlent et produisent ensemble ; mais il faut avouer que leur produit tient un peu de la stérilité des mulets, comme nous le verrons plus bas ; ce qui prouve de plus en plus l’ancienneté de la séparation des deux races.

Le tricolor huppé de la Chine est plus petit que notre faisan.

La beauté frappante de cet oiseau lui a valu d’être cultivé et multiplié dans nos faisanderies, où il est assez commun aujourd’hui : son nom de tricolor huppé indique le rouge, le jaune doré et le bleu qui dominent dans son plumage, et les longues et belles plumes qu’il a sur la tête, et qu’il relève quand il veut en manière de huppe ; il a l’iris, le bec, les pieds et les ongles jaunes, la queue plus longue à proportion que notre faisan, plus émaillée, et, en général, le plumage plus brillant : au-dessus des plumes de la queue sortent d’autres plumes longues et étroites, de couleur écarlate, dont la tige est jaune ; il n’a point les yeux entourés d’une peau rouge comme le faisan d’Europe ; en un mot, il paraît avoir subi fortement l’influence du climat.

La femelle du faisan doré est un peu plus petite que le mâle ; elle a la queue moins longue ; les couleurs de son plumage sont fort ordinaires, et encore moins agréables que celles de notre faisane ; mais quelquefois elle devient avec le temps aussi belle que le mâle : on en a vu une en Angleterre, chez milady Essex, qui, dans l’espace de six ans, avait graduellement changé sa couleur ignoble de bécasse en la belle couleur du mâle, duquel elle ne se distinguait plus que par les yeux et par la longueur de la queue[2] :

  1. Klein, Ordo Avium, p. 114. — Albin, t. III, p. 15.
  2. Voyez Edwards, planche lxvii.
  1. Phasianus pictus L. [Note de Wikisource : actuellement Chrysolophus pictus Linnæus, vulgairement faisan doré].
  2. Le Phasianus pictus L. constitue, contrairement à l’opinion de Buffon, une espèce véritable.