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Page:Buffon - Œuvres complètes, éd. Lanessan, 1884, tome V.djvu/471

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détails d’après l’oiseau mort, ne représente plus exactement ce faisan, et ne donne une idée plus juste de son port, de son air, etc.

Il est aisé de juger, par la seule inspection de la figure, que c’est une variété du faisan[NdÉ 1], modelée pour la forme totale sur les proportions du tricolor huppé de la Chine, mais beaucoup plus gros, puisqu’il surpasse même le faisan d’Europe : il a avec ce dernier un trait de ressemblance bien remarquable, c’est la bordure rouge des yeux qu’il a même plus large et plus étendue ; car elle lui tombe de chaque côté au-dessous du bec inférieur, en forme de barbillons, et d’autre part elle s’élève comme une double crête au-dessus du bec supérieur.

La femelle est un peu plus petite que le mâle, dont elle diffère beaucoup par la couleur ; elle n’a ni le dessus du corps blanc comme lui, ni le dessous d’un beau noir, avec des reflets de pourpre ; on n’aperçoit dans tout son plumage qu’une échappée de blanc au-dessous des yeux ; le reste est d’un rouge brun plus ou moins foncé, excepté sous le ventre et dans les plumes latérales de la queue, où l’on voit des bandes noires transversales sur un fond gris : à tous autres égards, la femelle diffère moins du mâle dans cette race que dans toutes les autres races de faisans ; elle a, comme lui, une huppe sur la tête, les yeux entourés d’une bordure rouge, et les pieds de même couleur.

Comme aucun naturaliste, ni même aucun voyageur, ne nous a donné le plus léger indice sur l’origine du faisan noir et blanc, nous sommes réduits sur cela aux seules conjectures : la mienne serait que, de même que le faisan de Géorgie, s’étant avancé vers l’Orient et ayant fixé son séjour dans les provinces méridionales ou tempérées de la Chine, est devenu le tricolor huppé, ainsi le faisan blanc de nos pays froids, ou de la Tartarie, ayant passé dans les provinces septentrionales de la Chine, est devenu le faisan noir et blanc de cet article, lequel aura pris plus de grosseur que le faisan primitif ou de Géorgie, parce qu’il aura trouvé dans ces provinces une nourriture plus abondante ou plus analogue à son tempérament, mais qui porte l’empreinte du nouveau climat dans son port, son air, sa forme extérieure, semblable au port, à l’air, à la forme extérieure du tricolor huppé de la Chine, et qui a conservé du faisan primitif la bordure rouge des yeux, laquelle même a pris en lui plus d’étendue et de volume, sans doute par les mêmes causes qui l’ont rendu lui-même plus gros et plus grand que le faisan ordinaire.

  1. On en a fait une espèce distincte, sous le nom de Phasianus nycthemerus L. Quelques ornithologistes considèrent même cette espèce comme le type d’un nouveau genre, auquel ils donnent le nom de Thaumalea, et le faisan doré devient le Thaumalea picta [Note de Wikisource : actuellement Lophura nycthemera Linnæus, vulgairement faisan argenté].