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Page:Buffon - Œuvres complètes, éd. Lanessan, 1884, tome V.djvu/579

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bois tout allumés, et mettre ainsi le feu dans la maison, en sorte que ce dangereux oiseau joint la qualité d’incendiaire à celle de voleur domestique ; mais on pourrait, ce me semble, tourner contre lui-même cette mauvaise habitude et la faire servir à sa propre destruction, en employant les miroirs pour l’attirer dans les pièges, comme on les emploie pour attirer les alouettes.

M. Salerne dit avoir vu à Paris deux coracias qui vivaient en fort bonne intelligence avec les pigeons de volière ; mais, apparemment, il n’avait pas vu le corbeau sauvage de Gesner, ni la description qu’en donne cet auteur lorsqu’il a dit, d’après M. Ray, qu’il s’accordait en tout, excepté pour la grandeur, avec le coracias[1], soit qu’il voulût parler, sous ce nom de coracias, de l’oiseau dont il s’agit dans cet article, soit qu’il entendît notre choquard ou le pyrrhocorax de Pline, car le choquard est absolument différent, et Gesner, qui avait vu le coracias de cet article et son corbeau sauvage, n’a eu garde de confondre ces deux espèces : il savait que le corbeau sauvage diffère du coracias par sa huppe, par le port de son corps, par la forme et la longueur de son bec, par la brièveté de sa queue, par le bon goût de sa chair, du moins de celle de ses petits, enfin, parce qu’il est moins criard, moins sédentaire, et qu’il change plus régulièrement de demeure en certains temps de l’année[2], sans parler de quelques autres différences qui le distinguent de chacun de ces oiseaux en particulier.

Le coracias a le cri aigre, quoique assez sonore, et fort semblable à celui de la pie de mer ; il le fait entendre presque continuellement : aussi Olina remarque-t-il que si on l’élève ce n’est point pour sa voix, mais pour son beau plumage[3]. Cependant Belon[4] et les auteurs de la Zoologie britannique[5] disent qu’il apprend à parler.

La femelle pond quatre ou cinq œufs blancs, tachetés de jaune sale : elle établit son nid au haut des vieilles tours abandonnées et des rochers escarpés, mais non pas indistinctement ; car, selon M. Edwards, ces oiseaux préfèrent les rochers de la côte occidentale d’Angleterre à ceux des côtes orientale et méridionale, quoique celles-ci présentent à peu près les mêmes sites et les mêmes expositions.

Un autre fait du même genre, que je dois à un observateur digne de toute confiance[6], c’est que ces oiseaux, quoique habitants des Alpes, des mon-

  1. Histoire naturelle des oiseaux, p. 91. — Ray, Synopsis Avium, p. 40.
  2. « Adventant initio veris codem tempore quo ciconiæ… Primæ omnium quod sciam avolant circa initium julii, etc. » Gesner, de Avibus, p. 352.
  3. « La cutta del becco rosso, che è del resto lutta nera come cornacchia, fuor che i piedi che son gialli, vien dalle montagne. Latinamente dicesi coracias. Questa non parla, ma solo si tiene per bellezza. » Uccellaria, fol. 35.
  4. Nature des oiseaux, p. 287.
  5. Page 84.
  6. M. Hébert, trésorier de l’extraordinaire des guerres, à Dijon.