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Page:Buffon - Œuvres complètes, éd. Lanessan, 1884, tome V.djvu/626

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observateur exercé, qui saisit rapidement le caractère naturel de la physionomie d’un animal, est plus décisif et plus sûr pour le rapporter à sa véritable espèce que l’examen détaillé des caractères de pure convention que chaque méthodiste établit à son gré.

Au reste, il est très facile et très excusable de se tromper en parlant de ces espèces étrangères, qui ne sont connues que par des descriptions incomplètes et par de mauvaises figures.

Je dois ajouter que l’isana a cette sorte de ris moqueur, ordinaire à la plupart des oiseaux qu’on appelle des pies en Amérique.

III.LA PIE DES ANTILLES[1].

M. Brisson a mis cet oiseau[NdÉ 1] parmi les rolliers[2] ; je ne vois pas qu’il ait eu d’autres raisons, sinon que dans la figure donnée par Aldrovande les narines sont découvertes, ce que M. Brisson établit en effet pour un des caractères du rollier[3] ; mais, 1o ce n’est qu’avec beaucoup d’incertitude qu’on peut attribuer ce caractère à l’oiseau dont il s’agit ici, d’après une figure qui n’a point paru exacte à M. Brisson lui-même, et qu’on doit supposer encore moins exacte sur cet article que sur aucun autre, tout ce détail de petites plumes étant bien plus indifférent au peintre qui veut rendre la nature dans ses principaux effets, qu’au naturaliste qui voudrait l’assujettir à sa méthode.

2o On peut opposer à cet attribut incertain, saisi dans une figure fautive, un attribut beaucoup plus marqué, plus évident, et qui n’a échappé ni au peintre ni aux observateurs qui ont vu l’oiseau même : ce sont les longues pennes du milieu de la queue, attribut dont M. Brisson a fait le caractère distinctif de la pie[4].

3o Ajoutez à cela que la pie des Antilles ressemble à la nôtre par son cri, par son naturel très défiant, par son habitude de nicher sur les arbres et d’aller le long des rivières, par la qualité médiocre de sa chair[5] : en sorte que si l’on veut rapprocher cet oiseau étranger de l’espèce d’Europe avec laquelle il a le plus de rapports connus, il faut, ce me semble, le rapprocher de celle de la pie.

  1. Voyez l’Histoire générale des Antilles, t. II, p. 258. — Aldrovandi Ornithologia, t. Ier, p. 788.
  2. Ornithologie, t. II, p. 80.
  3. Ibidem, p. 63.
  4. Ibidem, p. 35.
  5. Hist. des Antilles, loco citato. La pie va aussi le long des eaux, puisqu’elle enlève quelquefois des écrevisses, comme nous l’avons dit.
  1. Corvus caribæus L. [Note de Wikisource : identification impossible]. — Cuvier dit de cet oiseau : « Le Corvus caribæus est un Merops ou Guêpier, dont la description a été pillée par Du Tertre pour rendre un objet dont il se souvenait mal. »