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Page:Buffon - Œuvres complètes, éd. Lanessan, 1884, tome V.djvu/639

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n’ont pas été gênés par leur méthode, n’ont pas fait difficulté de le placer entre les geais et les pies, et même avec les choucas[1], qui, comme on sait, ressemblent beaucoup aux pies ; mais on prétend qu’il est encore plus babillard que les uns et les autres.

M. Klein distingue deux variétés dans l’espèce du casse-noix[2] : l’une qui est mouchetée comme l’étourneau, qui a le bec anguleux et fort, la langue longue et fourchue, comme toutes les espèces de pies ; l’autre, qui est moins grosse, et dont le bec (car il ne dit rien du plumage) est plus menu, plus arrondi, composé de deux pièces inégales dont la supérieure est la plus longue, et qui a la langue divisée profondément, très courte et comme perdue dans le gosier[3].

Selon le même auteur, ces deux oiseaux mangent des noisettes ; mais le premier les casse, et l’autre les perce : tous deux se nourrissent encore de glands, de baies sauvages, de pignons qu’ils épluchent fort adroitement, et mêmes d’insectes ; enfin tous deux cachent, comme les geais, les pies et les choucas, ce qu’ils n’ont pu consommer[NdÉ 1].

Les casse-noix, sans avoir le plumage brillant, l’ont remarquable par ses mouchetures blanches et triangulaires qui sont répandues partout, excepté sur la tête. Ces mouchetures sont plus petites sur la partie supérieure, plus larges sur la poitrine ; elles font d’autant plus d’effet et sortent d’autant mieux qu’elles tranchent sur un fond brun.

Ces oiseaux se plaisent surtout, comme je l’ai dit ci-dessus, dans les pays montagneux. On en voit communément en Auvergne, en Savoie, en Lorraine, en Franche-Comté, en Suisse, dans le Bergamasque, en Autriche,

  1. Gesner, De Avibus, p. 244. — Turner, ibid. — Klein, Ordo avium, p. 61. — Willughby, Ornithologie, p. 90. — Linnæus, Systema naturæ, édit. X, p. 106. — Frisch, pl. 56.
  2. Ordo avium, p. 61.
  3. Selon Willughby, la langue ne paraît pas pouvoir s’avancer plus loin que les coins de la bouche, le bec étant fermé, parce que dans cette situation la cavité du palais qui correspond ordinairement à la langue se trouve remplie par une arête saillante de la mâchoire intérieure, laquelle correspond ici à cette cavité : il ajoute que le fond du palais et les bords de sa fente ou fissure sont hérissés de petites pointes.
  1. Le Casse-noix accumule dans son œsophage de véritables provisions. M. de Sinéty a observé qu’à la fin de juillet et pendant le mois d’août il descend régulièrement des régions neigeuses des montagnes de la Suisse et s’approche des lacs et des villages où croissent des noisetiers. Il dépouille les noisettes des bractées foliacées qui entourent le fruit, puis introduit ce dernier dans son œsophage sans casser l’enveloppe ligneuse. Il accumule ainsi dans son œsophage jusqu’à une douzaine de noisettes, après quoi il remonte dans la région dont il fait son séjour habituel. Indépendamment de son œsophage, qui est très dilatable, le Casse-noix possède un organe spécial qui lui sert de garde-manger. « Cet organe, dit M. de Sinéty, est un sac à parois très minces, ouvert immédiatement au-dessous du muscle peaucier, dans l’angle des deux branches de la mâchoire inférieure où il occupe le triangle situé entre ces deux branches. Ce sac, entièrement dilatable, est situé au devant du cou, où il fait saillie des trois quarts à gauche de la ligne médiane. Sa longueur est environ des deux tiers de la longueur du cou de l’oiseau. »