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Page:Buies - Au portique des Laurentides, 1891.djvu/65

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LE CURÉ LABELLE

ment se désertait, le curé ne s’en apercevait pas ; il n’y avait plus personne autour de lui et il parlait encore, comme s’il y en avait eu dix. On le voyait se lever, aller de l’un à l’autre, apostropher, lancer une boutade ou un reproche sanglant, comme s’il eût eu affaire à quelque ennemi des colons, frapper du pied, menacer, tempêter, aller à grands pas, remplir de nouveau sa pipe, aspirer des bouffées violentes, interpeller tel ou tel ministre, et si subitement, à ce moment précis, quelqu’un, faisant irruption dans la salle, jetait un « Bonjour, monsieur le curé, » le fauve en colère avait déjà fui loin, bien loin, et le sourire le plus bienveillant, le plus accueillant, la bienvenue la plus aimable répondaient à l’arrivée du nouvel interlocuteur.


III


C’est à la suite d’un de ces déjeuners, qu’il n’avait pas oubliés et qu’il aimait à prolonger à table, quand aucune occupation pressante ne l’appelait au dehors, que le curé me fit part de ce qu’il appelait sa théorie sur la formation des terrains géologiques les bassins de la Rouge et