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Page:Buies - Au portique des Laurentides, 1891.djvu/78

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LE CURÉ LABELLE

vers lui chaque année et arrachées de la sorte au monstre dévorant de l’émigration, enfin pour persuader à tout un peuple que ce pays sauvage et inculte, désormais conquis et dompté par le patriotisme ardent d’un homme, renfermait peut-être l’avenir de notre race et en serait un jour l’asile, le camp retranché inexpugnable.

Ah ! il ne peut avoir qu’une idée bien étroite et bien imparfaite de notre continent celui qui n’a pas visité, qui n’a pas parcouru cet étonnant et indéfinissable pays qui s’étend en arrière des Laurentides jusqu’aux dernières latitudes habitables, entre les rivières du Saint-Maurice et de l’Outaouais ! C’est la grandeur, c’est la profondeur, c’est la sublimité mêmes. Cela est si vaste, si vaste, quand on regarde par-dessus le dôme sans bornes des forêts ou par-dessus les innombrables ondulations des montagnes qui semblent courir vers un horizon nulle part accessible, qu’on éprouve comme une sensation de rapetissement indéfini de soi-même et un effroi insurmontable de se trouver au milieu de cette immensité muette,