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Page:Buies - Chroniques, Tome 1, Humeurs et caprices, 1884.djvu/174

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CHRONIQUES

est la passion dominante de notre espèce ; au contraire ! On veut bien être l’égal de ses supérieurs, mais dès qu’on les a atteints, on se cherche immédiatement des inférieurs.

À ce propos, laissez-moi, pour finir, vous parler d’une grève de servantes dans une petite ville d’Ecosse appelée Dundee. Ces dames, réunies en convention générale, ont formulé catégoriquement leurs griefs et se sont plaint, entre autres choses,

1o. D’être obligées de se lever de trop bonne heure et de se coucher trop tard ;

2o. D’avoir à faire la cuisine le dimanche ;

3o. Mais surtout (c’est le grand grief) d’être tenues de porter une espèce de couvre-chef ou bonnet, appelé vulgairement « flag, » signe distinctif de la domesticité servile. Il a été en conséquence résolu de réclamer :

1o. La condition de se lever le plus tôt à six heures du matin et de se coucher à dix heures du soir le plus tard ;

2o. Une demi-journée de congé par semaine, plus deux dimanches de sortie par mois ;

3o. Le droit de se coiffer en cheveux, de porter le même chapeau que les maîtresses, de se parer de bijoux et de dentelles les jours de sortie :

4o. D’être dispensées du « flag, » même dans la maison, ou de le faire payer aux maîtresses qui persisteraient à l’imposer.

Ces réclamations des servantes de Dundee nous sembleraient à nous de la dernière modération. Il y a longtemps que, sans faire de grève, les servantes canadiennes ont obtenu ou plutôt se sont donné beaucoup plus que cela ; c’est au point que, chez nous, il serait