Aller au contenu

Page:Buies - Chroniques, Tome 1, Humeurs et caprices, 1884.djvu/218

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
218
CHRONIQUES

que vous me servez bien, nous sommes quittes. Mais que dire d’un homme qu’on élit malgré tout pendant vingt ans, qui vous sert très-mal, et qu’on ne renvoie qu’à la fin de sa carrière, lorsqu’il n’est plus capable de rien ? Il me semble que si quelqu’un doit avoir de la reconnaissance, c’est bien Sir George, et que si quelqu’un a montré une profonde ingratitude, c’est bien lui pour ses électeurs. Leur avoir donné un Drill-Shed et fait à peu près deux mille discours horribles, incompréhensibles, intraduisibles, irrépétables, et cela pour les remercier de l’avoir élu pendant un quart de siècle, c’est non-seulement la plus noire des ingratitudes, mais encore le plus odieux des forfaits !  !  !

Maintenant, qu’il soit pénible, douloureux même, de renvoyer de la scène politique, à la fin de sa carrière, le baronet malade, après trente ans de services publics et surtout privés, et surtout grand-tronqués,[1] je ne dis pas ; mais à qui la faute ? Pourquoi a-t-il persisté à être ingrat envers nous ? Après tout, que diable ! nous ne sommes pas pour nous sacrifier indéfiniment.

Le Parlement n’est ni un hôpital, ni un asile, et s’il fallait y envoyer tous les infirmes, tous les ramollis, sous prétexte qu’ils ont soixante ans et qu’il est difficile, à leur âge, de rompre avec de vieilles habitudes, nous en verrions de belles ! Ce ne serait pas une Législature que nous aurions, mais un musée de fossiles, une collection antédiluvienne, une exhibition vivante de toutes les infirmités humaines. Ce n’est pas avec cela

  1. Allusion à la dépendance complète dans laquelle se trouvait Sir George vis-à-vis la compagnie du chemin de fer « Grand Tronc. »