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Page:Buies - Chroniques, Tome 1, Humeurs et caprices, 1884.djvu/302

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tent le génie défaillant, l’espérance lasse d’attendre.

Je sortis, emportant avec moi deux lettres de recommandation très flatteuses, l’une pour le rédacteur-en-chef d’un grand journal, l’autre pour un savant très estimé et très répandu, homme précieux pour ceux qui ont besoin d’appui, aimé pour l’inépuisable bienveillance et la générosité de son cœur autant qu’admiré pour ses travaux. C’était M. Cortambert, géographe éminent, frère du rédacteur-en-chef du Messager Franco-Américain, que toute la jeunesse de Montréal a connu.

Je ne dirai pas tout ce que M. Cortambert et son fils ont fait pour moi : ce serait trop long et ça m’éloignerait trop de Bathurst, auquel il est temps que je revienne.

Ayant quitté Paris il y a cinq ans, je me suis trouvé à Bathurst, dans la Baie des Chaleurs, le 17 octobre dernier.

Ce n’est pas tout d’être à Bathurst : il faut s’y loger, et, une fois logé, ne pas se faire jeter dehors à propos de bottes. Vous allez voir où je veux en venir.

Bathurst, soit dit en forme de préambule, est une petite ville de seize à dix-huit cents âmes, bien et mal bâtie en bois, avec des rues larges qui n’ont pas de trottoirs, pittoresquement située au fond d’une baie dont le contour a trois milles, mais où il n’y a d’eau que pour les chalands et les goëlettes ; fendue en trois ou quatre parts par des rivières comparativement larges, sur l’une desquelles entre autres est construit un pont d’un demi-mille de longueur ; flanquée à droite, à gauche, en avant, en arrière, de collines magnifiques, de val-