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Page:Buies - Chroniques, Tome 1, Humeurs et caprices, 1884.djvu/323

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parvint à dépasser la crête des montagnes qui nous la dérobaient ; alors elle apparut brillante et superbe derrière les nuages qui fuyaient devant elle ; je n’oublierai jamais cette clarté subite sur ce terrible paysage. À droite, des rochers énormes, en escalade, comme des flots de pierres poussés l’un sur l’autre par une tempête ; à gauche, des vallons, des ravins, des forêts comme des manteaux qu’on déploie lentement, et la rivière de la Métapédia, tantôt se heurtant parmi ses mille îlots, tantôt coulant large et puissante et se développant en lacs successifs qui sont comme des réservoirs où elle puise et se déverse tour à tour.

La vallée de la Métapédia, au point de vue pittoresque, est admirable pendant les trente à quarante premiers milles. Ensuite elle s’enlaidit petit à petit devient monotone ; ses horizons se rétrécissent, et l’on se trouve enveloppé dans une ceinture de bois qui n’ont ni beauté, ni charme, ni même de gibier. Mais quelle superbe région agricole ! C’est là que sera un jour le grenier du Canada…



10 Décembre.

Savez-vous, lecteurs, que nous ne savons rien, et que c’est presque toujours le hasard qui apprend aux hommes le peu de choses qu’ils savent ?

Sept matelots, naufragés dernièrement sur la côte d’Afrique, se sont sauvés un à un en s’attachant aux pattes d’un énorme oiseau herbivore ; puis ils ont vu le même oiseau se jeter sur des tortues colossales, les briser sur les rochers et en manger cinq ou six dans