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Page:Buies - Chroniques, Tome 2, Voyages, 1875.djvu/257

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CONFÉRENCES.

dération qui, jusqu’alors, n’avait été qu’un essai et même plutôt un expédient, une dernière ressource politique dans la pensée de ses fondateurs, est aujourd’hui solidement assise ; les provinces se tiennent entre elles comme une chaîne dont les anneaux se resserrent de plus en plus ; le Canada, comme un jeune aigle qui essaie ses ailes avant de les livrer à l’espace, et s’arrête un instant, au seuil des mystérieuses profondeurs, entre la certitude de son vol, la liberté des airs et l’inquiétude vague de l’immensité, le Canada s’est soulevé sur son nid flottant entre deux océans, vaste comme un monde ; il a déployé ses bras avec ces tressaillements, pleins d’assurance à la fois, de la force qui ne s’est pas encore exercée ; il a pressenti, puis reconnu la destinée incomparable que l’avenir lui réserve, et il s’est élancé pour la conquérir. Non, le Canada n’a plus peur maintenant d’être dévoré ou englouti chaque fois que le nom des États-Unis se prononce ; le grand fantôme étoilé ne se dresse plus dans un ciel menaçant, la politique, avec ses meutes criardes, s’est sauvée des champs qu’elle avait envahis, les préjugés et les inspirations d’un chauvinisme comique s’effacent à la hâte devant les nécessités de situation et la volonté impérieuse des circonstances : les questions purement commerciales ont repris leur domaine libre, et les deux confédérations, les plus grandes au monde par l’étendue et peut-être par leur puissance future, vont pouvoir traiter sans ombrageuses défiances de leur bien-être intérieur et des moyens de se rendre mutuellement prospères.