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Page:Buies - Récits de voyages, 1890.djvu/219

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récits de voyage

port entouré d’édifices et des centaines de navire y chargeant leurs opulentes cargaisons… »

Ce temps n’est pas encore venu, mais le rêve de Charlevoix n’est pas non plus évanoui. Cent cinquante ans plus tard, de nos jours, un homme d’une nature d’élite, d’une imagination d’artiste, ému et enchanté par le spectacle grandiose qu’offre au regard notre fleuve, roulant dans un cadre de montagnes qui, tantôt, se poursuivent à perte de vue derrière l’horizon, en rassemblant tumultueusement leurs mamelons hérissés, comme des sanglots qui ont soulevé la vaste poitrine de la terre et se sont brisés en éclatant, tantôt s’abaissent sous la pression douce de quelque gorge qui ondule sur leurs flancs, tantôt coupent les cieux de leurs crêtes pelées et tondues par les orages, courbent avec fureur sous le vent du nord-est leurs forêts irritées, ou bien balancent aux souffles tièdes d’été leurs grandes ombres assoupies,… en présence d’un semblable spectacle, que la terre n’a nulle part répété, un autre homme a conçu, de nos jours, un rêve peut-être aussi grand que celui de Charlevoix, et, plus heureux que son devancier, il a voulu en commencer sans retard la réalisation.

Cet homme à qui les Québecquois sont tenus