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Page:Bulwer-Lytton - Alice ou les mystères.pdf/108

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LIVRE III


CHAPITRE I


Vous êtes encore ce que vous étiez naguère, monsieur !…

. . . . . . . . . . . . . . .

… Avec la plus vive agilité il savait se tourner et se retourner ; faire des nœuds et les défaire ; donner des conseils à deux faces.

(Volpone ou le Renard.)


Lumley, lord Vargrave, était assis devant une grande table couverte de papiers parlementaires. Son visage, bien qu’il eût encore le coloris de la santé, avait perdu cette fraîcheur de tons qui le distinguait dans sa jeunesse. Ses traits, accentués de tout temps, étaient devenus encore plus anguleux ; ses sourcils semblaient projeter une ombre plus épaisse sur ses yeux, qui, sans avoir rien perdu de leur éclat, s’étaient enfoncés plus profondément dans leurs orbites, et avaient perdu en partie leur inquiète et vive mobilité. Sa physionomie commençait à porter l’empreinte des tendances de son esprit ; sa bouche surtout, lorsqu’elle était au repos. C’était une figure remarquable par son intelligence subtile, par son énergie concentrée ; mais il y avait un je ne sais quoi dans cette physionomie qui vous avertissait de vous tenir sur vos gardes. Pour peu qu’on eût connu les hommes, on ressentait devant lui un vague soupçon, une défiance secrète.

Lumley s’était toujours montré fort soigné dans sa mise, quoiqu’il s’habillât avec simplicité ; mais il était évident qu’il déployait maintenant un plus grand soin de sa personne que dans sa jeunesse même ; et il y avait un peu de la fatuité célèbre du Romain dans l’adresse avec laquelle ses che-