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Page:Bulwer-Lytton - Mon roman, 1887, tome 2.djvu/211

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« Arrêtez, mon oncle, arrêtez ! Vous dites donc que si cet homme achète le brevet en question, cela pourra vous faire du tort ?

— Me faire du tort ? mais cela me conduira droit à la banqueroute, c’est-à-dire si ces machines réussissent ; mais j’espère que ce n’est qu’une blague.

— Elles réussiront, j’en réponds.

— Toi ! tu les as donc vues ?

— C’est moi qui les ai inventées. »

Dick retira brusquement son bras de celui de Léonard.

« Serpent ! s’écria-t-il ; c’est donc toi, que j’ai réchauffé à mon foyer, qui causeras la ruine de Richard Avenel !

— Non, c’est moi au contraire qui le sauverai. Venez dans la cité ; vous y verrez mon modèle et, s’il vous convient, je vous en cède le brevet.

— Un fiacre ! un fiacre ? un fiacre ! s’écria Dick Avenel arrêtant une voiture. Monte vite, Léonard ; je l’achète ton brevet, c’est-à-dire pourvu qu’il soit bon à quelque chose, et quant au payement…

— Ne parlez pas de payement, mon cher oncle.

— Eh bien, je n’en parlerai pas, reprit Dick plus doucement, car à vrai dire ce n’est pas là le sujet de conversation que je choisirais pour le moment. Laisse-moi d’abord me tirer des griffes de ce crocodile à moustaches noires, qu’on appelle le baron Lévy, puis ensuite — mais, monte, monte, et donne l’adresse au cocher ! »

Une inspection rapide de l’invention de Léonard suffit à convaincre Richard Avenel que ce procédé serait pour lui d’un inappréciable avantage. Il comprenait qu’armé d’un brevet dont les effets, quant à l’augmentation de puissance et la diminution de main d’œuvre, étaient évidents pour tout homme pratique, il lui serait maintenant facile de se procurer les avances d’argent dont il avait besoin soit pour le renouvellement de ses machines, soit pour payer les billets qu’avait escomptés Lévy, ou faire au capitaliste monstre une guerre acharnée. Il lui serait peut-être nécessaire de s’associer quelque autre capitaliste ; Mais alors même tout autre associé serait préférable à Lévy. Avenel fut soudain frappé d’une idée lumineuse.

« Si je parviens à effrayer cet infernal intrus pendant quelques mois, il m’offrira peut-être lui-même de s’associer avec moi, nous ferons des deux fabriques une seule combinaison, et à nous deux, nous ferons la loi au monde entier. »

La gratitude de Dick devint si expansive qu’il offrit à son neveu de le faire nommer à Lansmere en son lieu et place. Léonard refusa et Dick s’écria :

« Eh bien alors n’importe lequel de tes amis ; je suis pour la réforme contre ces hauts et puissants seigneurs des bourgs pourris, et par suite de prêts faits aux petits propriétaires, ou d’hypothèques prises sur leurs biens, et d’anciennes relations amicales avec les électeurs indépendants, je tiens certainement un des sièges, et peut-être les deux sièges du bourg de Lansmere dans les poches de mon paletot. »

Dick, après être convenu avec Léonard d’un rendez-vous chez son