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Page:Bulwer-Lytton - Mon roman, 1887, tome 2.djvu/224

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lady Lansmere, dans laquelle il prie Sa Seigneurie de ne pas permettre que vous retourniez chez lui, avant qu’il ne vienne vous chercher lui-même, et il le fera quand votre parole aura confirmé la sienne.

— Et vous osez me parler ainsi, en prétendant m’aimer ? »

Randal sourit ironiquement.

« Je prétends seulement vous épouser. L’amour est un sujet dont j’aurais pu vous parler naguère et dont je vous parlerai peut-être plus tard. Je vous laisse le temps de réfléchir. Permettez-moi d’espérer que lorsque je reviendrai, nous pourrons fixer le jour de notre mariage.

— Jamais !

— Vous serez alors la première fille de votre maison qui aura désobéi à son père, et vos torts seront d’autant plus graves que vous lui aurez désobéi alors qu’il est triste, exilé et déchu. »

Violante se tordit les mains.

« N’y a-t-il aucune alternative, aucun moyen d’échapper ?

— Je n’en connais point. Écoutez-moi. Je vous aime, il est vrai ; mais je ne travaille point pour mon bonheur en épousant une femme qui me hait, ni pour mon ambition en m’alliant à une pauvreté plus grande que la mienne. Je me marie pour être fidèle à la parole que j’ai donnée à votre père, et pour vous mettre à l’abri des poursuites d’un scélérat que vous haïriez bientôt, et contre lequel ni loi, ni murs, ni barrières, ne sauraient vous défendre. Une seule personne peut-être eût pu vous sauver de la douleur que paraît vous causer l’idée d’une union avec moi ; cette personne eût pu déjouer les plans de l’ennemi de votre père… peut-être faire révoquer sa sentence d’exil et lui faire rendre ses honneurs ; cette personne c’est…

— Lord L’Estrange ?

— Lord L’Estrange, répéta vivement Randal en examinant rapidement Violante, dont le visage changeait de couleur. Lord L’Estrange ! Que pourrait-il faire, et à quel propos le nommez-vous ? »

Violante détourna la tête.

« Il a déjà sauvé mon père une fois, dit-elle avec émotion.

— Et depuis il est intervenu, il a tergiversé, il a promis Dieu sait combien de choses, et qu’en est-il résulté ?… Votre père malheureusement se refuserait à voir la personne dont je parle… et s’il la voyait, il ne la croirait pas, n’aurait pas confiance en elle ; cependant elle est généreuse et sympathiserait avec vous. C’est la sœur même de votre ennemi, la marquise di Negra. Je sais qu’elle a beaucoup d’influence sur son frère, — qu’elle connaît assez ses secrets pour lui imposer de renoncer à tout dessein contre vous ; mais il est maintenant inutile de vous parler d’elle.

— Non, non, s’écria Violante. Dites-moi où elle demeure, je veux la voir.

— Pardonnez-moi de ne pouvoir vous obéir. D’ailleurs son propre orgueil est maintenant irrité par les malheureux préjugés de votre père contre elle. Il est trop tard pour recourir à son aide. Vous vous détournez de moi,… ma présence vous est à charge. Je vais vous en