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Page:Bulwer-Lytton - Mon roman, 1887, tome 2.djvu/225

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délivrer. Mais qu’elle vous soit à charge ou non, il vous faudra plus tard la subir… et pour la vie. »

Randal salua de nouveau avec cérémonie, se dirigea vers la maison et demanda lady Lansmere.

La comtesse était chez elle. Randal lui remit le billet de Riccabocca, qui était fort court ; il lui faisait part de ses craintes que Peschiera n’eût découvert la retraite de sa fille, et il priait Sa Seigneurie de retenir Violante, que celle-ci le voulût ou non, jusqu’à ce qu’il écrivît de nouveau,

La comtesse lut la lettre et sa lèvre se plissa dédaigneusement,

« C’est étrange ! se dit-elle à demi voix.

— Il est étrange n’est-ce pas qu’un homme tel que votre correspondant craigne un homme comme Peschiera. Est-ce là ce que vous voulez dire ?

— Monsieur, dit la comtesse un peu surprise, il est étrange que n’importe quel homme en craigne un autre dans un pays comme l’Angleterre.

— Je ne sais, dit Randal avec son rire silencieux, je crains plusieurs hommes et j’en connais plusieurs qui auraient raison de me craindre, cependant au détour de chaque rue on rencontre un policeman.

— Oui, dit lady Lansmere, mais supposer que ce libertin étranger puisse enlever une jeune fille comme Violante malgré elle… un homme qu’elle n’a jamais vu et qu’on doit lui avoir appris à haïr.

— Soyez néanmoins sur vos gardes, madame, je vous en supplie. « Qui veut la fin, trouve les moyens. »

Randal prit congé de la comtesse et retourna chez Mme di Negra. Il passa une heure avec elle, vit de nouveau le comte, puis se rendit à l’hôtel de Limmer.

« Randal, dit le squire qui était pâle et fatigué, mais qui pour rien au monde n’eût voulu avouer la douleur que lui causait la rébellion de son fils ; Randal, tu n’as rien à faire à Londres en ce moment, voudrais-tu venir avec moi là-bas, peut-être prendrais-tu goût à la culture. Je me rappelle que tu as fait preuve de connaissances solides au sujet du semage et des récoltes.

— Mon cher monsieur, j’irai vous retrouver aussitôt que les élections générales seront terminées.

— Que diable as-tu à démêler avec les élections générales ?

M. Egerton désire me voir entrer au Parlement ; des négociations sont même déjà entamées à ce sujet. »

M. Hazeldean secoua la tête.

« Je n’aime pas la politique de mon beau-frère, dit-il.

— Je serai complètement indépendant de lui, dit Randal avec hauteur. Cette indépendance est justement la condition que j’ai stipulée.

— J’en suis bien aise, et j’espère que si tu entres au Parlement, tu ne renieras pas la terre.