Aller au contenu

Page:Bulwer-Lytton - Mon roman, 1887, tome 2.djvu/236

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

au Casino peut-être, ou bien chez mistress Dale ou mistress Hazeldean. Je vais courir m’en informer au bureau des diligences. Pendant ce temps vous…

— Ne vous occupez pas de moi, monsieur Leslie. Faites ce que vous croyez le meilleur. Mais si vos suppositions sont justes, il faut que vous vous soyez montré un bien rude prétendant.

— Non, mais peut-être un prétendant importun. Si c’est à cause de moi qu’elle s’est enfuie, ai-je besoin de dire que je renonce à toute prétention. Je ne suis pas un amant égoïste, lord L’Estrange.

— Ni moi, un homme vindicatif, monsieur Leslie. Mais si je découvrais celui qui a conspiré contre cette jeune fille, placée sous la protection de ma mère, je l’écraserais dans la boue aussi facilement que je mets le pied sur ce gant. — Au revoir, monsieur Leslie. »

Randal demeura un instant immobile regardant Harley s’éloigner, puis sa lèvre se plissa et il murmura : « L’insolent ! Mais l’aime-t-il ? — S’il en est ainsi, je suis déjà vengé. »


CHAPITRE VI.

Harley alla droit à l’hôtel de Peschiera. On lui dit que le comte était sorti avec Frank Hazeldean et quelques autres messieurs qui avaient déjeuné chez lui, mais qu’il avait pris soin de dire, en cas qu’on vînt le demander, qu’il était au Tattersall pour examiner quelques chevaux en vente. Harley alla au Tattersall. Le comte était dans une des cours, appuyé contre un pilier et entouré d’amis fashionables. Lord L’Estrange s’arrêta et, par un effort héroïque d’empire sur lui-même, contint sa rage. « Je puis tout perdre si je lui montre que je le soupçonne, et cependant je suis résolu à l’insulter et à me battre avec lui plutôt que de le laisser libre. Ah ! voici le jeune Hazeldean. » Frank était debout, en dehors du groupe qui entourait le comte ; il avait l’air triste et préoccupé. Harley lui toucha l’épaule et l’attira à l’écart sans être remarqué.

« Monsieur Hazeldean, dit-il, votre oncle Egerton est mon meilleur ami. Voulez-vous être aussi le mien ? J’ai besoin de vous.

— Milord…

— Suivez-moi. Il ne faut pas que le comte de Peschiera nous voie causer ensemble. » Harley quitta la cour et entra dans le parc de Saint-James par la petite porte voisine du Tattersall. En quelques mots il informa Frank de la disparition de Violante et des raisons qu’il avait de croire que le comte n’y était pas étranger. Le premier mouvement de Frank fut de repousser avec indignation l’idée que le frère de Béatrix pût être coupable ; mais lorsque graduellement lui revinrent à l’esprit les conversations cyniques et corrompues du comte, les allu-