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Page:Bulwer-Lytton - Mon roman, 1887, tome 2.djvu/324

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je ne voudrais point le fâcher. Avec la fortune que lui procurera son mariage, il pourrait être un ennemi très-dangereux, surtout s’il réussit à entrer au Parlement.

— Baron, ces messieurs vous attendent ; je suivrai de mon côté. »


CHAPITRE XXIV.

Au centre de la plate-forme élevée dans la grande salle de l’hôtel de ville était assis le maire. De chaque côté de ce dignitaire se placèrent les candidats des deux partis. À sa droite Egerton et Leslie ; à sa gauche Dick Avenel et Léonard. La salle était aussi pleine que possible ; cette lutte excitait un immense intérêt, non-seulement à cause des principes politiques qui se trouvaient en lutte, mais encore à cause des passions locales qu’elle mettait en jeu. Dick Avenel, le fils d’un petit marchand, s’opposant à l’honorable Audley Egerton, le candidat du puissant parti aristocratique de Lansmere, se présentant avec son neveu et prenant, comme il avait coutume de dire, le taureau bleu par ses deux cornes oligarchiques ! il y avait dans la seule tentative de convertir le bourg important, pour les sièges duquel un puissant comte avait jusqu’ici laborieusement lutté, en deux sièges de famille pour la maison d’Avenel, une audace et une bravoure qui seules eussent suffi pour mettre en émoi tous les habitants du bourg, mais en outre venait s’y ajouter la curiosité qu’excitait la présence longtemps différée d’un candidat aussi célèbre que l’ex-ministre, d’un homme dont la carrière avait commencé par le succès remporté à Lansmere, et qui maintenant, au fort de la tempête populaire, venait réparer son vaisseau dans le port même d’où il avait d’abord fait voile. De nouvelles générations avaient grandi depuis que le nom d’Egerton avait pour la première fois mis en émoi les pigeonniers de cette Coriole. Les questions qui alors semblaient si importantes étaient pour la plupart réglées ou oubliées. Mais ceux qui se rappelaient avoir vu Egerton à cette époque étaient frappés du peu de changement qu’avaient apporté les années dans son maintien et dans l’expression de sa physionomie. Lorsque pendant quelques instants il se tint debout près du maire, avant de prendre son siège, examinant l’assemblée, qui éclatait en applaudissements et en sifflets, c’était la même taille droite et imposante, le même regard calme et ferme, la même dignité mystérieuse et indéfinissable qui imprimait le respect, confirmait l’estime et commandait à la haine. Les sifflets se turent involontairement.

Les dispositions préliminaires étant prises, les parrains et les seconds commencèrent leur office.

Audley fut naturellement proposé par le coq du parti, un gentle-