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Page:Bulwer-Lytton - Mon roman, 1887, tome 2.djvu/95

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— D’un poète ! Oh, non ! dit Léonard en souriant doucement Les poètes, eux, ont besoin de trouver le repos, là où ils aiment. »

Harley fut frappé de cette réponse et y réfléchit en silence : « Oui, je comprends, se dit-il ; c’est une lumière nouvelle ; ce qu’il faut à un homme dont la vie tout entière est une aspiration vers la gloire, dont l’âme fatiguée, cherche une compagne, ce n’est pas l’amour d’une nature semblable à la sienne. Il a raison, il lui faut le repos. Tandis que moi !… tout jeune qu’il est, ses intuitions sont plus sages que toute mon expérience ! — C’est l’animation, l’énergie, l’élévation qu’il ne faudrait trouver dans l’amour. Mais mon choix est fait ; avec Hélène du moins, ma vie sera paisible et mon foyer sacré. Que le reste dorme dans le tombeau avec ma jeunesse.

— Mais, dit Léonard qui désirait arracher son noble ami à une rêverie évidemment pénible, vous ne m’avez pas encore dit le nom du futur de la signorina ?

— C’est un nom qui probablement vous est inconnu. Randal Leslie, un homme en place. Vous avez refusé une place, vous avez bien fait.

— Randal Leslie ! plaise à Dieu que non ! s’écria Léonard stupéfait.

— Amen ! Mais que savez-vous de lui ? »

Et Léonard raconta à son interlocuteur l’histoire du pamphlet de Burley.

Harley parut ravi de voir ses préventions contre Randal justifiées.

« Quel misérable prétendant ! Et moi qui m’imaginais qu’il était formidable. Mais nous voici chez Mme di Negra ; préparez-vous à la voir et rappelez-vous votre promesse. »


CHAPITRE XXVII.

Quelques jours se sont écoulés. Léonard et Mme di Negra sont devenus amis. Harley est satisfait de ce que lui rapporte le jeune poète. Lui-même a été activement occupé. Il a recherché, mais en vain, les traces de mistress Bertram ; il a chargé de cette investigation un homme de loi qui jusqu’ici n’a pas été plus heureux que lui. En outre Harley a reparu dans le monde comme un brillant météore et menace de faire fureur. Néanmoins il a chaque jour trouvé le moyen de consacrer quelques heures à ses parents. Il a continué de taquiner fréquemment Violante, qui commence à s’y accoutumer et à lui répondre sur le même ton. Il fait toujours à Hélène la même cour tranquille et presque silencieuse. Léonard est devenu un hôte habituel de l’hôtel Lansmere, tout le monde l’y aime et l’y accueille. Peschiera n’a pas