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Page:Bulwer-Lytton - Pelham, 1874 tome II.djvu/47

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aspect cadavérique, à contenance grave et sérieuse, et qui avait, dans toute sa personne, quelque chose de Clutterbuck lui-même.

Mon Dieu ! me dis-je, il est impossible qu’il ait mis le mariage assez vite à profit pour avoir déjà tiré ce pâle exemplaire de sa propre image, en sept mois de temps. Le brave garçon se retourna et faillit tomber de son haut en me voyant si près de lui. Il descendit précipitamment de son échelle et me serra la main avec une telle chaleur et une telle énergie qu’il m’en fit venir les larmes aux yeux comme il les avait lui-même.

« Doucement, mon brave ami, lui dis-je ; parce precor, ou vous allez me forcer à vous dire : ibimus una ambo, flentes valido connexi fœdere. »

Les yeux de Clutterbuck devinrent encore bien plus humides quand il entendit les sons harmonieux de cette langue qui était pour lui la langue maternelle. Il m’examina de la tête aux pieds, et arrachant à son repos et à son isolement un vieux fauteuil de crin dur ratatiné et couvert de poussière antique et vénérable, il m’y enfonça avant que j’eusse eu le temps de me mettre en garde contre cette cruelle hospitalité.

Oh ! mes pauvres culottes ! me dis-je ! Quantus sudor inerit Bedoso, pour vous rendre votre propreté primitive.

« Mais, d’où venez-vous ? me dit mon hôte qui aimait les apostrophes à la façon antique.

— Des jeux Pythiens, lui dis-je ; du campus de Newmarket. Si je ne me trompe, cet insignis juvenis vous ressemble étonnamment ? Il faut que ce soit un rival des Titans, s’il n’a encore que sept mois.

— Ah vraiment, mon digne ami, vous aimez à rire, cet enfant est mon neveu, un bon garçon très-travailleur. J’espère qu’il honorera dignement notre alma mater, la science. Il entre au collège de la Trinité au mois d’octobre prochain. Benjamin Jérémie, mon garçon, voici l’ami et le bienfaiteur dont je t’ai si souvent parlé. Va faire préparer ce que nous avons de meilleur, car il veut bien partager notre repas.