Aller au contenu

Page:Bulwer-Lytton - Pelham, 1874 tome II.djvu/46

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

avoir fait des vœux pour le bonheur domestique de mon ami, dans le coin le plus recule de ma mémoire.

La maison dont je commençais à approcher était petite mais confortable ; peut-être y avait-il quelque chose de triste dans les haies de l’enclos taillées à l’ancienne mode à angles droits, avec une régularité mathématique, ainsi que dans la lourde architecture et dans les briques sombres de l’habitation du révérend reclus. En revanche il y avait aussi dans l’apparence de cette maison quelque chose de calme et de tranquille qui s’accommodait bien aux goûts et aux habitudes de celui qui l’habitait. Au milieu d’une petite pelouse de forme régulière se voyait un vivier construit en briques et orné, à ses quatre angles, de saules pleureurs qui y inclinaient leur feuillage mélancolique. En face de ce réservoir était un hermitage ou berceau de lauriers dans le style rustique de l’école hollandaise ; il remontait évidemment au bon temps où florissait cette école. Au delà, une légère palissade formait la limite d’un verger qui s’étendait derrière le jardin d’agrément.

Le bruit que je fis en agitant la cloche sembla retentir avec une force singulière au milieu de ce lieu désert, et je pus voir à la fenêtre qui faisait face à la porte, tout ce remue-ménage de rideaux tirés, de visages se montrant furtivement aux vitres, et de retraite rapide, qui dénotent l’anxiété et la perplexité féminine, à l’apparition inattendue d’un étranger.

Au bout de quelques instants, l’unique domestique du pasteur, un brave homme entre deux âges, très-sale, vêtu d’une longue lévite et de culottes de casimir gris, m’ouvrit la porte et m’apprit que son maître était à la maison. Après avoir donné quelques instructions pressantes à mon introducteur qui était, comme les domestiques de plus d’une bonne maison, à la fois valet de chambre et palefrenier, pour qu’il prît bien soin du cheval, j’entrai dans la maison. Le domestique ne jugea pas qu’il fût nécessaire de me demander mon nom ; il ouvrit la porte du cabinet et m’annonça en ces termes : « Un gentleman, monsieur. »

Clutterbuck me tournait le dos, il était monté sur une échelle de bibliothèque, occupé à ranger de vieux livres ; en bas de l’échelle se tenait un jeune homme pâle et d’un