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Page:Bulwer-Lytton - Pelham, 1874 tome II.djvu/51

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son plus vieil ami, sans avoir auparavant consulté la maîtresse du logis ; il n’y a qu’une personne (dit ma mère, et elle dit vrai) qui puisse parler d’affaires de ménage, c’est celle qui en a la direction. Aussi pour me conformer à ce précepte, je ne me permettrai d’accepter une invitation ici que si c’est la maîtresse de la maison elle-même qui me convie.

— En vérité, me dit madame Clutterbuck en rougissant avec un mélange d’embarras et de satisfaction, vous êtes plein d’égards et de politesse, M. Pelham. Je voudrais seulement que M. Clutterbuck accordât à ces choses-là la moitié de l’attention que vous y apportez ; on ne peut s’imaginer le trouble et le dérangement qu’il me cause souvent. Si j’avais été prévenue de votre arrivée un peu à l’avance… mais j’ai bien peur que nous n’ayons absolument rien à la maison. Toutefois, si vous voulez courir les chances de notre pauvre dîner, M. Pelham…

— Votre bonté me ravit, m’écriai-je, et je ne vous cacherai pas plus longtemps le plaisir que j’ai à accepter l’invitation de mon vieil ami. »

Cette affaire ainsi arrangée, je continuai à causer pendant quelques minutes, appelant à mon aide tout mon entrain, et lorsque je rentrai dans la bibliothèque, ce fut avec la douce conviction d’avoir changé en amies des personnes disposées à me recevoir en ennemi.

En attendant le dîner qui avait lieu à quatre heures, Clutterbuck et moi, nous nous amusâmes à causer en sages. Il y avait dans les sentiments de cet homme une élévation et une générosité qui faisaient vivement regretter que la tournure de son esprit condamnât ces belles qualités à une sorte d’impuissance. Étant au collège, il n’avait jamais (illis dissimilis in nostro tempore natis) fait de courbette devant les personnages qui étaient en possession du pouvoir clérical. Dans l’exercice des devoirs de sa charge comme doyen de l’établissement, il avait toujours été d’une justice et d’un sévérité égale envers tous les élèves, qu’ils portassent le bonnet noir ou la toque à gland d’or. Un de ses élèves particuliers, dont le père était peut-être le plus riche propriétaire de bénéfices ecclésiastiques de toute la pairie, se montra rebelle à ses admonestations répétées et