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Page:Bulwer-Lytton - Pelham, 1874 tome II.djvu/56

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— Allons, Dixon, ma mémoire me trompe étrangement ou je vous ai donné la somme de quatre livres et quelques shillings pour de l’orge vendredi dernier.

— Oui, monsieur, mais votre vache et les poules mangent tant ! et puis Dobbin l’aveugle a quatre rations par jour, et le fermier Johnson met toujours son cheval dans notre écurie, et puis mistress Clutterbuck et ces dames ont donné à manger l’autre jour à l’âne qu’on avait loué pour l’atteler à la petite charrette, et puis encore il y a les rats et les souris qui sont toujours après le grain.

— Je suis surpris au dernier point, répondit Clutterbuck, des dégâts que me cause cette vermine : il semble qu’ils considèrent mon pauvre bien comme étant leur propriété particulière ; faites-moi souvenir que je dois écrire au Dr Dissectall demain, mon bon Dixon.

— Oui, monsieur, et puis j’y pense, il y a… »

Ici M. Dixon fut interrompu au milieu de ses item, par l’entrée d’une troisième personne qui montra aussitôt qu’elle était bel et bien madame Clutterbuck.

« Quoi, vous n’êtes pas encore habillé, monsieur Clutterbuck ? quel lambin vous faites ! voyez un peu qui est-ce qui s’est jamais conduit avec une femme comme vous faites avec moi ? bon ! voilà que vous avez essuyé votre rasoir à mon bonnet de nuit, malpropre, sale que vous êtes !

— Je vous demande bien pardon, c’est vrai, je reconnais mon erreur dit Clutterbuck d’un ton qui annonçait une vive contrariété.

— Votre erreur ! cria mistress Clutterbuck avec une voix de fausset aiguë, retentissante et querelleuse, appropriée à la circonstance, mais c’est toujours la même chose ; tenez, je n’en puis plus et vous me poussez à bout, mais Dieu me pardonne, pauvre idiot ! je crois que vous avez passé vos méchantes jambes de fuseau dans les manches de votre habit croyant mettre votre culotte !

— En vérité, ma bonne amie, vos yeux sont plus clairvoyants que les miens : et mes jambes qui sont, comme vous le dites, un peu maigres, se sont introduites là où elles n’avaient que faire ; mais tout cela ne fait pas, Dorothée, que je mérite l’épithète d’idiot, dont il vous a plu de