Page:Bunyan - Le pelerinage du chretien a la cite celeste.djvu/92

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Pourquoi donc, pensa-t-il, ne serait-il pas avec moi, bien que les difficultés contre lesquelles j’ai à lutter dans ce lieu m’empêchent de m’apercevoir de sa présence ?

Enfin, il était ravi de penser que, s’il parvenait à atteindre celui qui marchait devant lui, il ne serait pas obligé de continuer sa route seul.

Il avança donc et appela ; mais celui qui le précédait, se croyant aussi seul, ne répondit rien. Bientôt après, les premiers rayons du jour parurent, et Chrétien prononça ces paroles : « Il a changé les plus noires ténèbres en aube du jour »[1].

Quand le soleil fut levé, il regarda derrière lui, non dans l’intention de rebrousser chemin, mais pour voir au grand jour les dangers qu’il avait courus pendant la nuit. Il vit alors bien mieux qu’il ne l’avait fait auparavant le fossé qui était d’un côté du chemin et le marais qui était de l’autre, et remarqua combien le sentier qui les séparait était étroit ; il aperçut aussi, mais dans le lointain, les spectres, les lutins et les dragons de l’abîme (depuis qu’il faisait jour, ils ne s’approchaient plus) ; cependant il les entrevit, selon ce qui est écrit : « Il met en évidence les choses qui étaient cachées dans les ténèbres, et il produit au jour l’ombre de la mort »[2].

Alors Chrétien fut vivement touché, en pensant

  1. Amos V, 8.
  2. Job. XII, 22.