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Page:Burney - Evelina T2 1797 Maradan.djvu/261

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rement de langage et de conduite à mon égard, vous me chasserez partout où vous serez ».

Je m’étois levée, résolue de m’en aller ; mais sir Clément me retenant toujours se jeta à mes pieds, et s’écria du ton le plus passionné : « Qu’osez-vous dire, miss ! est-il possible que vous poussiez votre froideur mortelle, jusqu’à me défendre le moindre rayon d’espérance » ?

« J’ignore, monsieur, de quelles espérances vous parlez ; ai-je jamais prétendu vous en donner » ?

« Ah ! vous me mettez hors de moi-même, et je ne puis endurer plus long-temps votre mépris. Modérez cette extrême cruauté, si vous ne voulez me réduire au désespoir : dites du moins, belle inexorable, dites du moins que mon état vous fait pitié… ».

Dans ce même moment un malheureux hasard conduisit mylord Orville devant le berceau où nous étions assis. Sa vue fut pour moi un coup de foudre ; il pâlit lui-même et parut interdit. Il se disposa à retourner sur ses pas, mais je l’appelai à mon secours, et j’exhortai sévèrement sir Clément à lâcher ma main ; celui-ci se leva, mais il me retenoit toujours, et le lord, peu attentif à