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Page:Burney - Evelina T2 1797 Maradan.djvu/346

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m’accompagner jusqu’au haut de l’escalier, et m’exhorta de son mieux à prendre courage : ses efforts furent inutiles, je me représentois vivement ce que cette entrevue avoit de terrible ; et, dans cet instant auguste, je ne connoissois d’autre sentiment que celui de la crainte.

Enfin, je fus introduite ; mon père m’accueillit avec bonté. « Est-ce vous, ma fille » ? me dit-il.

Je volai vers lui, et me jetai à ses pieds. « Oui, je la suis, monsieur ; je suis votre fille : heureuse que vous vouliez la reconnoître ». Il tomba lui même à genoux, et me serra tendrement dans ses bras. « Te reconnoître ! oui, mon enfant, volontiers ; mais Dieu sait avec quel mélange de plaisir et de douleur je m’acquitte de ce devoir ». Nous nous levâmes tous deux, et nous passâmes dans un cabinet voisin qu’il ferma à clef. Puis il m’approcha d’une fenêtre, et, après m’avoir considérée avec une inquiétude des plus attendrissantes, il s’écria :

« Oh ! ma pauvre Caroline » ! et à ces mots il versa un torrent de larmes. Faut-il vous dire, monsieur, que ce spectacle fit couler les miennes en abondance ?

Je voulus de nouveau embrasser ses