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sance desquels elle ne possédait aucun document que son nom, le témoignage de Françoise, et les réminiscences qu’elle avait conservées de son séjour au château de Noirbois.

On ne s’en va pas ainsi, dans le vaste monde, quand on a chez soi le pain de chaque jour et la paix du foyer.

Au surplus, elle savait, par les renseignements que lui avait fournis Pierre, que la propriété des Laroche avait été vendue par la nation. Elle renonça donc à ce projet, lequel — c’était une nouvelle raison, et non la moindre — n’avait jamais reçu l’approbation de Françoise, la fidèle servante.

D’ailleurs, elles vivaient une existence si calme, presque heureuse, dans leur maisonnette franc-montagnarde, loin du passage des armées qui, durant une vingtaine d’années, ont pour ainsi dire traversé la vieille Europe dans tous les sens. Elles avaient tellement peu de besoins, leurs broderies, admirablement faites, étaient si recherchées par quelques négociants de la Chaux-de-Fonds, qu’on pouvait dire qu’elles étaient dans une certaine aisance, si l’on comparait leur situation à celle d’un grand nombre de familles des environs. Leurs gains suffisaient amplement à