fautes, dont seuls les êtres véritablement nobles savent
accepter leur part de responsabilité. Vivant, Leconte
de Lisle a trop longtemps et trop durement souffert
des soumissions auxquelles asservit la gêne, pour
qu’on ait le droit de réclamer en faveur de sa mémoire les fausses pitiés du monde et les pardons qui,
comme toutes les charités, amoindrissent et rabaissent. À la hauteur où sa belle intelligence le place,
peut-il craindre de paraître devant les générations à
venir, tel que l’a créé la nature et tel que la vérité
nous le montre, faible seulement en sa misère
d’homme, mais infaillible en sa volonté d’art. Et précisément, parce qu’il manquait de résistance aux
fâcheuses contingences, ne devons-nous pas admirer
davantage et retenir comme une preuve de force
supérieure l’exemple qu’il a su donner aux créateurs
futurs en demeurant, malgré les embûches et les
souffrances, le lutteur invaincu de l’idéal, la pure
conscience en poésie.
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FIN