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Page:Carey - Principes de la science sociale, Tome 3.djvu/387

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gent des adresses à celles d’Amérique, au sujet des maux de l’esclavage, et qu’un membre du clergé anglican félicite ses lecteurs de ce que « jamais pouvoir civilisé n’a été engagé dans des guerres si constantes et si multiples, » puisqu’on peut dire « que dans l’histoire des deux derniers siècles, il ne s’est pas écoulé un mois, une semaine, où les Anglais eurent échangé quelques coups de fusil ou de sabre sur un point quelconque de la surface du globes. » « — Regardez, dit-il plus loin, n’importe dans quelle époque du Temps ; le pavillon national s’avance comme un météore à travers des flots de sang, » — et c’est là, nous-assure-t-on, « un rôle indispensable dans la position de l’Angleterre[1].

Le système anglais nous donne ainsi guerre perpétuelle contre les nations de la terre, au moyen de soldats et de marins, de canons et de poudre ; et guerre perpétuelle au sein même de toute nation, — cette dernière guerre, conduite à l’aide de ces grands capitalistes qui peuvent faire les sacrifices nécessaires pour conquérir et s’assurer la possession des marchés étrangers. — Contre qui cependant cette double guerre est-elle surtout conduite ? C’est contre les êtres qui ne peuvent travailler aux champs, — contre le sexe faible. Incapable de remuer la terre ; voilà qu’on les chasse du moins rude travail de transformation des denrées premières dans tout pays soumis au système, « de Smyrne à Canton, de Madras à Samarcande. » Que leur reste-t-il alors ? Dans des millions de cas, rien autre que la prostitution. Et pourtant on nous vante constamment les effets civilisateurs de ce système du trafic, auquel on a si mal appliqué le mot commerce. — Nous allons voir comment il tend à améliorer la condition des femmes anglaises elles-mêmes.

§ 4. — Comment la centralisation trafiquante influe sur la condition des femmes anglaises. Accroissement de concurrence pour la vente du travail de la femme. Abaissement de salaires qui en est la suite et nécessité de recourir à la prostitution. La protection tend à produire concurrence pour l’achat du travail — à l’avantage du sexe dans le monde entier.

Depuis l’époque d’Adam Smith, l’Angleterre compte 160.000 petits propriétaires de moins. C’est autant de demeures vides aujourd’hui des maris, des femmes, des pères et des mères, qui, il n’y a pas un siècle, vivaient sur une terre par eux possédée en propre et entourés de leurs enfants. Cela a eu lieu dans toute la Grande-Bretagne. — Le droit coutumier du clans-man (l’homme du clan] a tout à fait disparu, et on a purgé d’eux la terre avec une dureté dont il n’est d’autre exemple nulle part,

  1. Rev. J. White. The Eighteen Christian Centuries, p. 482. — C’est dans les deux siècles, dont il s’agit, que la femme anglaise a perdu tous les droits précédents à sa propriété propre et à celle de son mari.