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Page:Carey - Principes de la science sociale, Tome 3.djvu/432

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poste sans permission, leur propriété entière était confisquée au profit de la curie. — Tout habitant marchand ou autre qui possédait une propriété foncière au-dessus de vingt-cinq arpents jugera devait être réclamé pour les fonctions municipales et ne pouvait refuser. Il advint que, sous de telles conditions, le pouvoir coordinateur des cités tomba tout à fait. — La classe moyenne s’éclipsa et ne laissa derrière elle que les officiers du gouvernement central d’une part et des esclaves de l’autre.

Après la chute de l’empire romain, les anciennes institutions renaissent peu à peu. — Les cités, les bourgs, les confréries reparaissent sur la scène, investis de pouvoirs et de privilèges de corporation et avec une juridiction civile et criminelle étendue. Présentant des barrières à la tyrannie féodale, ces immunités étaient recherchées non-seulement par soif de liberté, mais par un désir de création de monopoles locaux, — la première tendant à favoriser l’habitude d’association, le second tendant à la limiter. Fournissant protection à ceux qui pratiquaient les arts et métiers, elles formaient contre-poids aux pouvoirs exorbitants et à la rapacité naguère non refrénée des barons. Facilitant le commerce et favorisant le développement d’individualités, elles donnaient de la valeur à la terre et au travail, et ajoutaient largement à la force de l’État dont elles étaient une partie[1]. C’est par ce moyen que l’ordre et la sécurité dans l’industrie, l’agriculture et les arts purent renaître en France, en Espagne, en Allemagne, en Italie, dans les Pays-Bas et en Angleterre ; — le rétablissement d’un gouvernement régulier, après les siècles de désordre qui suivirent l’invasion des hordes barbares, fut dû en grande partie à l’institution de corporations civiles et à l’extension de leurs privilèges.

La politique civile américaine se distingue par l’importance et la diversité des corporations civiles, — dont l’effet est de distribuer, décentraliser et coordonner le pouvoir politique. Sous elle, les comtés, les bourgs et les cités sont tenus comme étant de quasi-corporations investies de pouvoirs législatifs subordonnés qui doi-

  1. Voy. précéd., vol. I, p. 140, au sujet des cités des Albigeois dans les XIe et XIIe siècles. Les droits et libertés de Londres furent assurées par une provision de la magna charta dans le XIIIe siècle. « M. Renouard, dans son Histoire du droit municipal en France, dit M. Guizot, a donné les traces d’un système municipal, en vigueur, sans interruption, du VIIIe au XIIe siècle.