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Page:Carmontelle - Théâtre de campagne, tome II.djvu/11

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truite de cette préférence que ces Messieurs.

La Marquise.

Parce que la jalousie qu’inspire un amour malheureux l’éclaire, lui fait pénétrer les plus secrets mystères. J’ai vu Mademoiselle d’Hennebaud se contraindre davantage vis-à-vis du Chevalier, & avoir plus de liberté avec le Comte ; elle s’observoit continuellement avec le premier, & elle n’y pensoit pas avec l’autre ; enfin tout m’a prouvé quelle aimoit le Chevalier, & qu’elle vouloit qu’il l’ignorât. Forcée aujourd’hui de se déterminer, ce sera sûrement en sa faveur, & le Comte n’ayant plus d’espoir, son amour s’affaiblira, & je pourrai peut-être parvenir à le consoler.

Justine.

Comment Madame peut-elle aimer un cœur tout rempli d’un autre ? Veuve, riche ; moi, je voudrois…

La Marquise.

C’est cet amour tendre & délicat dont je l’ai vu capable qui m’a fait desirer d’en être aimée, & qui me l’a fait espérer ; quand on est réellement sensible, c’est un besoin pour notre cœur d’aimer, & l’on finit souvent en écoutant un malheureux, par lui faire goûter un