Aller au contenu

Page:Chénier - Œuvres poétiques, édition Moland, 1889, volume 1.djvu/270

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Nymphe de Seine, on dit que Paris sur tes rives
Fait asseoir vingt conseils de critiques nombreux,
Du Pinde partagé despotes soupçonneux
Affaiblis de leurs yeux la vigilance amère ;
Dis-leur que sans s’armer d’un front dur et sévère,
Ils peuvent négliger les pas et les douceurs
D’une Muse timide, et qui parmi ses sœurs,
Rivale de personne et sans demander grâce,
Vient, le regard baissé, solliciter sa place ;
Dont la main est sans tache, et n’a connu jamais
Le fiel dont la satire envenime ses traits.


X[1]

AU CHEVALIER DE PANGE


 Quand la feuille en festons a couronné les bois
L’amoureux rossignol n’étouffe point sa voix.
Il serait criminel aux yeux de la nature,
Si, de ses dons heureux négligeant la culture,
Sur son triste rameau, muet dans ses amours,
Il laissait sans chanter expirer les beaux jours.
Et toi, rebelle aux dons d’une si tendre mère,
Dégoûté de poursuivre une muse étrangère
Dont tu choisis la cour trop bruyante pour toi,
Tu t’es fait du silence une coupable loi !
Tu naquis rossignol. Pourquoi loin du bocage
Où des jeunes rosiers le balsamique ombrage

  1. Édition 1819