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Page:Chamberlain - Richard Wagner, sa vie et ses œuvres, 1900.djvu/293

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simplicité, l’orgueil à l’humilité, etc.), Wagner nous initie à ces profondeurs de l’être intime. Qui ne sentirait qu’ainsi nous avons appris à mieux connaître l’homme que fut Rienzi, que notre regard, jeté dans son âme, a pénétré plus avant que ne nous le permettaient la description minutieuse et les intrigues compliquées du roman ? On peut dire que Wagner nous donne une véritable leçon d’histoire, car il est impossible de construire l’histoire avec des documents seuls, j’entends : « l’histoire des âmes » ; les événements extérieurs ont un caractère tout réflexe, ils s’enchevêtrent dans tous les sens, et nulle part l’impulsion de la volonté n’apparaît dans son expression vraie et pure ; il n’y a que le poète qui puisse plonger au fond des âmes et nous révéler la vérité, la vérité simple et grande.

Que si, d’ailleurs, on trouve dans Rienzi, comme Wagner lui-même l’a souvent fait remarquer, « une négligence frappante dans le vers et la diction », l’œuvre n’en est que plus intéressante pour nous faire comprendre la signification de Wagner en tant que poète. Nous avons coutume, en effet, de voir dans l’élégance du vers, dans le choix des métaphores, dans l’enchaînement des belles pensées, les conditions fondamentales d’un poème de valeur ; et nous nous trompons, car cette valeur fondamentale, le sceau propre du grand poète, c’est sa puissance créatrice. Ici, nous avons ce cas étrange, et bien particulier, qu’un poème écrit, à dessein, pour servir de livret à un opéra, et de versification peu soignée, se trouve contenir une grande tragédie. Il y a là de quoi donner à penser. L’explication de cette chose étrange, il faut la chercher dans la puissance poétique propre à la musique.

Wagner dit, dans l’introduction au premier volume