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ESCLAVE AMOUREUSE

rien, car la seule chose qu’elle pourrait regretter, c’est la cessation de cet esclavage.

Mais sous l’empire de son tyran, Lucette ne cherchera pas de bonheur ailleurs que près de lui elle le suivra partout où il ira ; s’il ne vient pas, elle l’attendra des jours et des nuits, elle s’accrochera à lui pour qu’il ne se sépare pas d’elle et toutes les tortures elle les subira pourvu qu’il soit là, toujours là.

Tout lui semblera donc indifférent, hormis cet amour insensé.

Elle a soif de martyre, comme autrefois les saintes qui s’administraient les plus cruelles mortifications pour un idéal surhumain.

Mais au contraire des maladies qu’on soigne pour en atténuer ou en faire disparaître la souffrance, elle exagère et complique son idée qui est bien extravagante volupté. Volupté aiguë que la sagesse ne peut comprendre, qui ne fait pas mourir, mais qui davantage fait vivre.

— Ma chasteté, mon honneur sont perdus, pense-t-elle, mais qu’importe puisque je vis une passion rare.

Elle vit l’extase de ces martyrs, de ces chrétiens : ces longues théories pénétrant dans l’arène pour être livrées aux bêtes, ne sentant pas l’odeur âcre du charnier, ne percevant pas les hurlements sinistres