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Page:Charles De Coster - Légendes Flamandes.djvu/149

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tué cette douce servante que j’aimais ; et de même il a fait à quinze autres pitoyables vierges, lesquelles pendent au champ de potences bien honteusement ; il est pour le pays plus cruel vastateur que peste, mort et guerre ; et ès toutes chaumines, de son fait sont pleurs et grand deuil ; frère, je le veux tuer. »

Mais le Taiseux considérait Magtelt et ne répondait mot.

« Frère, » dit-elle, « il ne me faut refuser, car mon cœur tire à lui. Ne vois-tu assez comme je suis céans triste et marrie, et comme je mourra à douleur ne faisant point ce que je dois. Mais y étant allée, je reviendrai joyeuse et chantant comme davant. »

Mais le Taiseux ne sonnait mot.

« Ha, » dit-elle, « as-tu crainte pour mot, considérant combien de bons chevaliers l’assallirent et furent par lui vaincus terriblement, voire même toi, mon vaillant frère qui encore portes de ses marques ? Je n’ignore point qu’il est écrit sur sa targe : « Nul ne peut contre moi. » Ains ce que tous n’ont pu, une le pourra. Il marche confiant en sa force, plus magnifique qu’olifant et plus fier que lion, se cuidant invincible, mais quand la bête va d’assurance plus à l’aise besogne le chasseur. Frère, puis je aller à Halewyn ? »

Cependant que Magtelt en était là de son propos,